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Le gouvernement du Québec a accusé un revers lorsque ses deux premiers amendements au projet de loi C-13 visant à moderniser la Loi sur les langues officielles ont été rejetés.
Le gouvernement du Québec a accusé mardi un revers lorsque ses deux premiers amendements au projet de loi C-13 visant à moderniser la Loi sur les langues officielles ont été rejetés à la suite de vifs débats en comité parlementaire.
Le député libéral montréalais Anthony Housefather est monté au créneau dès le dépôt par le Bloc québécois d’un amendement qui visait principalement à reconnaître l’aménagement linguistique qu’a prévu le Québec dans sa Charte de la langue française.
«Évoquer la Charte de la langue française dans ce projet de loi, c’est essentiellement dire qu’on accepte que seuls certains Québécois anglophones soient servis en anglais: seulement ceux qui ont accès aux écoles anglaises, a-t-il dit en anglais. C’est aussi accepter d’utiliser la clause dérogatoire de manière préventive.»
M. Housefather a plus tard proposé que toute référence à la Charte de la langue française soit retirée du projet de loi que parraine la ministre des Langues officielles — qui est issue de leur propre parti.
Aux craintes de s’assujettir à une loi provinciale, le conservateur Bernard Généreux a répliqué que sa formation politique ne donne pas «carte blanche» au gouvernement du Québec puisque C-13 prévoit déjà une révision régulière de la loi.
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C’est véritablement le Nouveau Parti démocratique (NPD) qui détenait une fois de plus le vote décisif. Lors d’une très brève prise de parole, la députée Niki Ashton a déclaré être préoccupée par «l’ordre de priorité entre les deux lois», soit la Loi sur les langues officielles et la Charte de la langue française telle que modifiée en juin par la loi 96. Elle a ensuite voté contre l’amendement bloquiste.
En mêlée de presse, Mme Ashton a tenté d’amoindrir le poids de sa décision en disant que le vote portait sur un aspect du préambule de la loi. «C’est tout symbolique dans le préambule, a-t-elle dit. On n’était pas d’accord avec le l’ordre de priorité, mais ça ne veut pas dire qu’on ne respecte pas la Charte (de la langue française) ou le besoin d’appliquer la Charte.»
Quelques instants plus tard, le porte-parole du Bloc québécois en matière de Langues officielles, Mario Beaulieu, a admis du bout des lèvres avoir été surpris par le vote du NPD.
Leur éventuel appui à l’application de la Charte de la langue française aux entreprises de compétence fédérale — un amendement qui devrait passer grâce à un consensus des oppositions — implique «qu’ils sont d’accord jusqu’à un certain point que le Québec doit être le maître d’œuvre de son aménagement linguistique», a-t-il dit.
Le deuxième amendement qui a semé la discorde venait notamment affirmer que le français est la langue commune du Québec, ce que ne digéraient pas les libéraux. Mme Ashton ainsi que la députée conservatrice de l’Ontario Marilyn Gladu ont toutes deux voté «contre» et n’ont pas expliqué leur décision.
«Je ne vois pas pourquoi ce mot est nécessaire. C’est la langue officielle, oui, le français. Mais d’ajouter le mot “commune” pourrait impliquer des obligations selon l’interprétation de quelqu’un à l’avenir», a plaidé Marc Garneau, le député libéral de Notre-Dame-de-Grâce–Westmount.
Sa collègue Patricia Lattanzio de Saint-Léonard–Saint-Michel a ensuite affirmé en anglais que cette «nouvelle notion» n’est définie «nulle part». Or, l’experte du ministère du Patrimoine canadien lui a indiqué que ce terme est bel et bien défini dans la Charte de la langue française.
«La langue commune, ça veut dire la langue de convergence, la langue qui rassemble tout le monde, a résumé aux journalistes le bloquiste Mario Beaulieu qui avait déposé l’amendement demandé par le gouvernement du Québec. Si on veut avoir une société cohérente, (il) faut qu’on puisse se parler à un moment donné.»
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M. Beaulieu a soutenu que la Charte de la langue française «n’enlève rien aux anglophones» et a dit avoir l’impression que ceux qui s’y objectent «n’acceptent pas (...) que la société québécoise intègre les immigrants».
Le comité permanent des langues officielles a prévu de tenir jusqu’à six autres rencontres pour l’étude article par article du projet de loi.
L’un des moments marquants de l’étude du projet de loi devrait survenir au cours des prochaines semaines lorsque les députés se prononceront sur un amendement visant à assujettir les entreprises privées de compétence fédérale à la Charte de la langue française, comme le réclame le gouvernement du Québec.
Les partis ont déjà affiché leurs couleurs: les libéraux sont contre, mais les oppositions conservatrice, bloquiste et néo-démocrate sont en faveur, ce qui devrait permettre à l’amendement de passer, à moins d’un coup d’éclat.
Le projet de loi C-13 consacre un nouveau droit de travailler et d’être servi en français au Québec et dans les «régions à forte présence francophone» des autres provinces dans les entreprises privées de compétence fédérale, comme les banques, les compagnies aériennes ou ferroviaires. Or, la Charte de la langue française du Québec ne donne pas le choix de la langue. C’est le français. Point.