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La Société canadienne du cancer pointe que C-5 pourrait affaiblir les normes de santé

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049295a50aad1738c229052522fff0a54ef9cd6597d44ed52caa44891c6a912f.jpg La Société canadienne du cancer prévient le gouvernement Carney que son projet de loi visant à éliminer les barrières commerciales interprovinciales pourrait compromettre les normes de santé. Le premier ministre Mark Carney répond à une question lors de la période des questions à la Chambre des communes, sur la Colline du Parlement, à Ottawa, le mercredi 11 juin 2025. LA PRESSE CANADIENNE/Sean Kilpatrick

Les groupes antitabac avertissent le gouvernement Carney que son projet de loi visant à éliminer les barrières commerciales interprovinciales pourrait compromettre les normes de santé, à moins qu'il ne soit modifié pour y ajouter de nouvelles mesures de protection.

Le cabinet de la ministre du Commerce intérieur, Chrystia Freeland, insiste toutefois sur le fait que le projet de loi n'affaiblira pas les lois sur la santé ou l'environnement.

Le projet de loi C-5, que le gouvernement tentera de faire adopter rapidement à la Chambre des communes la semaine prochaine, vise deux objectifs: éliminer les barrières interprovinciales au commerce et à la mobilité de la main-d'œuvre, et accélérer l'approbation des grands projets industriels, comme les mines, les ports et les pipelines.

Le projet de loi permettrait aux normes provinciales de remplacer les normes fédérales afin de faciliter la vente de produits fabriqués au Canada dans l'ensemble du pays.

Rob Cunningham, analyste principal des politiques à la Société canadienne du cancer, affirme toutefois que le libellé actuel pourrait avoir des conséquences imprévues, car les règles provinciales sont parfois plus souples.

Il met en garde contre une possible résurgence de produits interdits par la réglementation fédérale, comme ceux contenant de l'amiante.

«Il existe une mesure fédérale interdisant l'amiante dans les produits, mais les provinces autorisent jusqu'à un certain pourcentage d'amiante dans les produits, a-t-il expliqué. Cela signifierait donc que, malgré l'interdiction de l'amiante dans les produits depuis quelques années, l'amiante pourrait réapparaître dans les produits. Ce n'est pas une bonne chose.»

Il a également suggéré que la loi pourrait donner aux fabricants de tabac la possibilité de réintroduire des cigarettes mentholées ou aromatisées, ce qui «ne devrait pas se produire».

Le bureau de Mme Freeland a souligné vendredi soir que les rédacteurs et les conseillers techniques qui ont travaillé sur le projet de loi avaient spécifiquement examiné son incidence sur les règles relatives au tabac lors de sa conception.

«En ce qui concerne le tabac et les produits connexes, les exigences fédérales concernent la fabrication, la vente et la promotion du tabac. Les exigences provinciales concernent l'utilisation et la vente au détail du tabac», a détaillé Sarah Jackson, directrice des opérations du bureau de Mme Freeland.

«Étant donné que les exigences fédérales et provinciales/territoriales traitent d'éléments différents et ne visent pas le même objectif, la Loi ne s'appliquera pas aux produits du tabac», a-t-elle ajouté.

Des inquiétudes

Plus tôt vendredi, plusieurs groupes de santé se sont mobilisés pour exprimer leurs inquiétudes quant au libellé vague du projet de loi.

«Nous craignons que l'industrie du tabac et du vapotage ne profite d'une norme provinciale moins stricte pour affaiblir une réglementation fédérale plus stricte qui protège la santé des Canadiens partout au pays», a souligné Manuel Arango, vice-président des politiques et de la défense des intérêts à la Fondation des maladies du cœur et de l'AVC.

Ottawa pourrait également créer une exception spécifique pour la santé par voie réglementaire après l'adoption du projet de loi. Le gouvernement n'a pas indiqué qu'il le ferait.

Cynthia Callard, directrice de Médecins pour un Canada sans fumée, s'est dite inquiète de l'adoption précipitée du projet de loi au Parlement, car le problème «se cachera probablement dans les détails de la réglementation».

«Si celle-ci n'est pas bien conçue, il existe un risque certain que la protection de la santé devienne un dommage collatéral d'une poussée vers une activité économique accrue», a-t-elle avancé.

«Les gouvernements provinciaux et fédéral partagent la compétence en matière de santé et d'environnement. C'est pourquoi il est important de prévoir une protection juridique contre un nivellement par le bas en matière de réglementation protectrice. Je ne vois pas cela dans le projet de loi», a-t-elle ajouté.

Le Bloc Québécois, le Nouveau Parti démocratique et le Parti vert accusent le gouvernement du premier ministre Mark Carney de tenter de faire adopter le projet de loi à toute vitesse par le Parlement, sans étude suffisante.

M. Carney a promis d'éliminer les politiques fédérales qui constituent un obstacle au commerce interprovincial d'ici la fête du Canada.

Le ministre des Affaires intergouvernementales, Dominic LeBlanc, a présenté les arguments économiques en faveur des aspects commerciaux du projet de loi lors du débat à la Chambre des communes vendredi.

Il a déclaré que le projet de loi éliminerait les «coûts inutiles» et la «confusion réglementaire» qui «entravent la capacité des Canadiens à commercer, à se connecter et à travailler partout au pays.»

«Si un bien est produit conformément aux normes provinciales, il peut circuler partout au pays sans avoir à se conformer aux normes fédérales», a-t-il soutenu.

Il a souligné les différents niveaux d'exigences en matière d'efficacité énergétique qui peuvent empêcher la vente de produits d'une province à l'autre.

Il a indiqué qu'un produit fabriqué en Ontario qui répond aux «exigences rigoureuses en matière d'efficacité énergétique» de la province pourrait néanmoins être interdit de vente au Québec ou au Manitoba s'il ne respecte pas non plus les normes fédérales.