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«Nous reconnaissons que le député n'aurait pas dû tenir ce genre de propos».
Les conservateurs de Pierre Poilievre jugent que leur collègue ontarien Larry Brock a tenu des propos «inacceptables» lorsque, il y a une semaine, il a reproché à mots couverts, en pleine Chambre des communes, au ministre Jean-Yves Duclos d'avoir répondu en français à une question posée en anglais.
«Nous reconnaissons que le député n'aurait pas dû tenir ce genre de propos là qui ont créé un doute. Alors, c'est inacceptable. Maintenant, il s'est excusé», a lâché, jeudi, le porte-parole conservateur en matière de langues officielles, Joël Godin, après trois heures de débat au comité des langues officielles.
M. Godin, dont la formation politique tente par toutes les manœuvres d'obstruction parlementaire imaginables d'éviter que son député Brock soit blâmé par le comité, a imploré les députés autour de la table de mettre de l'eau dans leur vin pour trouver un moyen de permettre à celui-ci de «sortir honorablement de cette impasse».
En après-midi, lors de la période des questions, le ministre Duclos, qui est également lieutenant politique de Justin Trudeau pour le Québec, a réclamé, deux fois plutôt qu'une, que M. Brock se lève en Chambre pour s'excuser de «ses propos anti-francophones».
Le conservateur québécois Gérard Deltell lui a renvoyé qu'il voit clair dans son jeu en essayant de «tasser l'attention des gens sur leur réalité économique». M. Brock, lui, n'a pas bronché.
C'est le député libéral Angelo Iacono, celui-là même qui, le printemps dernier, avait déclaré que le Québec devrait être officiellement bilingue, qui a déposé, mardi dernier, la motion ayant initié la paralysie que provoquent désormais les conservateurs pour éviter qu'elle ne soit votée.
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Sa motion condamne non seulement les propos de M. Brock, mais également de sa collègue albertaine Rachael Thomas, qui avait demandé en novembre 2023 à la ministre du Patrimoine canadien, Pascale St-Onge, de répondre à ses questions en anglais devant un comité parlementaire.
«Il faut que les conservateurs arrêtent de parler des deux côtés de la bouche et qu'ils assument le poids de leurs mots, a déclaré M. Iacono au début de la rencontre de jeudi. Chez les conservateurs, c'est récurrent le manque de respect envers les francophones.»
Les conservateurs ont maintes fois insisté que M. Brock s'est excusé. Or, la porte-parole néo-démocrate en matière de langues officielles, Niki Ashton, leur a répondu qu'«une excuse sur Twitter, ce n'est pas une excuse en Chambre».
«On parle d'un député conservateur qui a démontré un manque de respect flagrant envers la francophonie», s'est-elle indignée.
Pour les conservateurs, les libéraux n'ont pas de leçons à donner à qui que ce soit, ayant notamment deux députées québécoises, Anna Gainey et Emmanuella Lambropoulos, qui ne reconnaissent même pas le déclin du français au Québec.
En entrevue avec La Presse Canadienne, M. Godin a expliqué qu'«être parlementaire ne fait pas de nous des gens parfaits», que son collègue a fait un «accident de parcours», s'est excusé et qu'il faut passer à autre chose.
Le député québécois Joël Lightbound leur a rappelé cependant que «c'est à peine» si l'opposition ne voulait pas au printemps dernier que le député libéral franco-ontarien Francis Drouin «se jette dans le goudron et qu'on lui jette des plumes» après qu'il eut traité des témoins de «pleins de marde».
Un total d'environ 3 h 30 de débats sur la motion a eu lieu jusqu'à présent.
Dès le départ, M. Godin a tenté de rendre la motion irrecevable, jugeant que le comité serait en train de «dicter le comportement d'un député à la Chambre des communes», mais le président a tranché qu'il n'y a pas de problème puisque le comité n'imposerait pas de sanctions.
M. Godin a ensuite tenté de faire annuler la décision, puis d'amender la motion pour que le comité se désole que le premier ministre Justin Trudeau ait nommé une gouverneure générale qui ne parle pas le français. Ce fut un échec à chaque fois.
Jeudi, il a annoncé avoir les «deux mains tendues», offrant aux libéraux que le comité s'en tienne à rappeler à tous les députés «leur droit de s’exprimer dans l’une ou l’autre des langues officielles en tout temps au Parlement».
Il voulait du même souffle retirer la condamnation des propos, la demande que des excuses soient prononcées en Chambre, et de reprocher à M. Poilievre son «inaction (...) face aux propos anti-francophones répétitifs de ses députés».
Lors du débat, le Britanno-Colombien Marc Dalton a été appelé à la rescousse pour écouler du temps, parlant de tout et de rien pendant pas moins d'une heure et 15 minutes. Il a notamment abordé «les coureurs des bois» et a trouvé moyen de présumément citer «Jésus».
Des discussions sont en cours entre les partis pour tenter de trouver un compromis pour amender la motion afin de «se concentrer» sur les propos de Larry Brock, a indiqué Marc Serré, le secrétaire parlementaire du ministre des Langues officielles, en entrevue après la réunion.
«Après aujourd'hui, je suis encouragé des commentaires des conservateurs ici, a-t-il dit. Peut-être qu'on ne devrait pas peinturer tous les conservateurs dans le même bateau. (...) Soyons clairs: faire des excuses à Twitter, ce n'est pas faire des excuses. Il faut qu'il prenne un petit peu plus de responsabilités M. Brock.»
Plutôt discret durant les échanges, le porte-parole bloquiste en matière de langues officielles, Mario Beaulieu, a confirmé à La Presse Canadienne qu'il appuie la motion d'origine et qu'il juge «déplorable» l'obstruction systématique.
«Ça reflète un peu ce qu'on voit en Chambre: les libéraux et les conservateurs qui se garochent de la bouette. Mais dans les faits, ni l'un ni l'autre ni le NPD ne veut faire quoi que ce soit pour le français au Québec», a-t-il dit.
En vertu du règlement, les députés peuvent s'exprimer tant et aussi longtemps qu'ils le souhaitent sur une motion. La prochaine rencontre du comité est prévue mardi et le président a annoncé qu'il ne convoquera pas les témoins qui sont prévus.