Les Autochtones qui ont été pris en charge par le gouvernement pendant leur enfance ont une santé et des résultats socioéconomiques plus faibles plus tard dans leur vie que ceux qui n’ont jamais été pris en charge, révèle un nouveau rapport de Statistique Canada.
Ils souffrent de taux d’invalidité plus élevés, d’un niveau de santé auto-évalué plus faible et d’un plus grand nombre d’itinérants. Ils sont aussi plus susceptibles d’avoir du mal à répondre aux besoins de base de leur ménage, indique le rapport publié mardi.
Statistique Canada affirme que malgré la fermeture des pensionnats et la fin de la rafle des années soixante – le retrait à grande échelle des enfants autochtones de leur foyer pour les faire adopter – la séparation des familles continue d’être «disproportionnellement élevée dans les communautés autochtones».
«Les données ne mentent pas. Elles racontent une histoire, a soutenu la cheffe Pauline Frost, qui exhorte le Canada à renégocier les réformes de la protection de l'enfance des Premières Nations à l'échelle nationale, après l'échec des tentatives de l'année dernière. Nous ne pouvons pas continuer sur cette voie de destruction. Nous devons chercher des solutions.»
Selon les données de 2018 citées par Statistique Canada, 11 % des Autochtones âgés de 15 ans et plus ont déclaré avoir été pris en charge par le gouvernement pendant leur enfance, tandis que seulement 2 % des répondants non autochtones ont dit la même chose.
L’agence détaille que 16 % des enfants des Premières Nations, 9 % des Inuits et 6 % des Métis ont affirmé avoir été pris en charge par le gouvernement.
«Ces séparations et ces pertes sont associées non seulement à des problèmes de santé, mais aussi à une diminution des perspectives éducatives et socioéconomiques, peut-on lire dans le rapport de Statistique Canada. Les enfants autochtones pris en charge par le système de protection de l’enfance affichent un taux d’obtention du diplôme d’études secondaires nettement plus faible que celui des enfants non autochtones et des enfants autochtones qui ne sont pas concernés par ce système.»
Les deux tiers des Autochtones pris en charge par le gouvernement pendant leur enfance ont déclaré avoir un handicap, contre 46 % de ceux qui n'étaient pas pris en charge.
De plus, 60 % des enfants pris en charge pendant leur enfance ont rapporté avoir des difficultés à répondre aux besoins de leur ménage, contre seulement 38 % de ceux qui n'étaient pas pris en charge. Ce sont 26 % des Autochtones pris en charge pendant leur enfance qui ont affirmé avoir connu l’itinérance, contre 7 % de ceux qui n’étaient pas pris en charge.
«Bien que le présent article ne permet pas d’établir une relation de cause à effet entre (la séparation familiale pendant l’enfance et les moins bons résultats chez les adultes autochtones), il démontre l’existence d’un lien entre le fait d’avoir été pris en charge par l’État durant l’enfance et les défis permanents auxquels les adultes autochtones sont confrontés aujourd’hui, notamment les problèmes de santé mentale, l’incapacité, l’itinérance et l’instabilité économique», conclut le rapport.
Des tentatives ont été faites pour réformer le système de protection de l’enfance, notamment une tentative lancée après une décision historique du Tribunal canadien des droits de la personne (TCDP) selon laquelle le Canada discriminait les enfants des Premières Nations en sous-finançant les services dans les réserves.
Le TCDP a demandé au gouvernement fédéral de travailler avec les Premières Nations pour réformer ce système, mais les progrès ont été bloqués après que les chefs ont rejeté une proposition de 47,8 milliards $ visant à transférer le contrôle du système aux Premières Nations.
Malgré les appels des chefs pour qu’Ottawa revienne à la table de négociation, Mme Frost a déclaré que le Canada était un partenaire réticent puisqu’il a informé l’Assemblée des Premières Nations qu’il ne renégocierait qu’avec l’Ontario.

