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Tout juste constitué, le gouvernement est déjà menacé de tomber par la gauche et l'extrême droite.
Après près de quatre semaines de tractations menée par le Premier ministre Sébastien Lecornu, la France s'est dotée dimanche d'un nouveau gouvernement, le troisième en un an qui, à peine formé, est déjà sous la menace d'être renversé par les oppositions de gauche et d'extrême droite.
Un vent de fronde venait même du parti de droite Les Républicains, dont le chef, Bruno Retailleau, ministre de l'Intérieur reconduit, s'est insurgé publiquement dans la soirée contre sa composition qui «ne reflète pas la rupture promise».
La présidence de la République a dévoilé une liste de 18 ministres - d'autres doivent être annoncés après le discours de politique générale du Premier ministre prévu mardi -, dont nombre étaient déjà présents dans le précédent gouvernement du centriste François Bayrou.
C'est le cas notamment de Bruno Retailleau, de Jean-Noël Barrot aux Affaires étrangères ou encore de Gérald Darmanin à la Justice.
La surprise de ce nouveau gouvernement tient dans le retour de Bruno Le Maire, nommé aux Armées où il prendra la suite de Sébastien Lecornu. M. Le Maire a été l'inamovible ministre de l'Economie et des finances d'Emmanuel Macron pendant sept ans, de 2017 à 2024.
Le macroniste Roland Lescure est pour sa part nommé ministre de l'Economie et des Finances. Il aura la lourde responsabilité de présenter un projet de budget 2026 acceptable par le Parlement, alors que les finances publiques du pays sont au plus mal, avec une dette de 3.300 milliards d'euros, représentant plus de 115 % du PIB.
Tout juste constitué, le gouvernement est déjà menacé de tomber par la gauche et l'extrême droite. Sébastien Lecornu a demandé à ses ministres de «trouver des compromis avec nos oppositions».
Alors que le premier ministre négocie en premier lieu avec les socialistes pour s'éviter une censure immédiate et tenter de passer ensuite le cap du budget, les premières réactions étaient très négatives. «Ils se font renverser mais restent en poste», a protesté le chef des députés du PS Boris Vallaud, dénonçant l'«obstination» des macronistes qui «plonge chaque jour un peu plus le pays dans le chaos».
Le président du parti d'extrême droite Rassemblement national (RN) Jordan Bardella a raillé un gouvernement «composé des derniers macronistes agrippés au radeau de la Méduse», tandis que pour Jean-Luc Mélenchon, chef de file de LFI (gauche radicale), ce «cortège de revenants (...) ne tiendra pas».
Et alors que Les Républicains, après de longues tergiversations, avait opté pour une «participation exigeante» au gouvernement, ils en digéraient mal la composition, en particulier la présence de Bruno Le Maire, qu'ils accusent d'avoir contribué à la «dette abyssale» de la France.
«Devant la situation politique créée par cette annonce, je convoque demain matin le comité stratégique des Républicains», une instance qui regroupe les principales personnalités des Républicains qui se réunira à 11H30 (5h30, heure de l'est), a annoncé Bruno Retailleau.
De quoi aviver les spéculations sur un possible retrait de LR d'un gouvernement qui serait alors mort-né, plongeant davantage le pays dans la crise politique.
Comme ses deux prédécesseurs, Michel Barnier et François Bayrou, le nouveau Premier ministre doit naviguer sur la scène politique éclatée issue des législatives qui ont suivi la dissolution surprise de l'Assemblé nationale décidée en juin 2024 par le chef de l'Etat.
L'hémicycle est fracturé en trois blocs (alliance de gauche / macronistes et centristes / extrême droite). Aucun ne dispose de la majorité absolue, ce qui a plongé le pays dans une instabilité chronique.
En place depuis le 9 septembre, Sébastien Lecornu, homme de confiance d'Emmanuel Macron venu de la droite, a multiplié les consultations afin de tenter de résoudre l'équation d'une majorité introuvable et d'échapper à la chute dès le prochain écueil, le vote du budget 2026 à l'automne, comme cela avait été le cas pour son prédécesseur François Bayrou.
Mais il n'aura réussi qu'à péniblement rallier à lui le bloc central (appelé «socle commun»), attelage fragile entre les macronistes et Les Républicains, qui composait déjà les deux précédents gouvernements.
Malgré l'annonce par Sébastien Lecornu du renoncement au 49.3 - un article de la Constitution qui permet d'adopter un texte sans vote - «nous nous dirigeons tout droit vers la censure» si «la donne ne change pas», a prévenu samedi le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure.
Pour tenir, le gouvernement devra obtenir, a minima, une non-censure du PS, indispensable pour doter la France d'un budget pour 2026, dont la préparation a fait tomber le gouvernement sortant qui avait présenté un effort de 44 milliards d'euros. LFI et les Ecologistes ont eux déjà annoncé qu'ils censureraient le gouvernement.