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Le ministre Guilbeault a soutenu vendredi que le Canada avait été parmi les premiers pays à réclamer la création de ce fonds, et il a insisté sur le fait que les plus grands émetteurs du monde devaient tous mettre la main à la pâte.
Les participants à la COP27 seraient près d’une entente sur l’aide financière aux pays en voie de développement gravement affectés par les changements climatiques, mais tout indique que certains pays ont du mal à accepter l’idée d’être contributeurs plutôt que bénéficiaires.
Le ministre fédéral de l’Environnement, Steven Guilbeault, a laissé entendre, vendredi en conférence de presse virtuelle depuis Charm el-Cheikh, en Égypte, que la Chine et d’autres pays ne peuvent plus être considérés comme étant « en développement », même s’ils sont toujours désignés ainsi sur une liste vieille de 30 ans.
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M. Guilbeault a expliqué que si les participants s’entendent sur la création d’un fonds dont le montant doit éventuellement atteindre les 100 milliards $ pour compenser les pertes et dommages des pays vulnérables, il y a toujours des différends: « Nous croyons que le fonds devrait inclure tous les grands émetteurs, ce qui inclurait un pays comme la Chine, des grands émetteurs comme l’Arabie Saoudite ou le Qatar, des pays qui ont aussi des niveaux de vie beaucoup plus élevés que ce qu’ils avaient quand la convention de Rio a été adoptée en 1992. »
« Les choses ont changé: la Chine a la deuxième plus importante économie au monde maintenant et est le plus grand producteur de GES (gaz à effet de serre) au monde. Nous ne pouvons plus faire semblant que nous vivons dans le monde de 1992 », a soutenu le ministre.
Les discussions ont d’ailleurs été prolongées jusqu’à samedi alors qu’elles devaient prendre fin vendredi, justement pour traiter de cette délicate question que Steven Guilbeault estime être la clé de cette COP27: « La mesure du succès, pour nous, dans cette salle est des résultats concrets pour garantir que les fonds provenant d’une large base de contributeurs parviennent aux plus vulnérables pour garantir que les pertes et dommages dévastateurs et hélas inévitables puissent être traités de manière significative, une discussion que ce processus a négligée depuis trop longtemps. »
Par ailleurs, la question de l’élimination du charbon et des subventions aux énergies fossiles se trouve également sur la table et le Canada, soutient-il, fait pression pour des positions plus musclées: « Il y a une référence spécifique au charbon, à la réduction de l’utilisation du charbon et à l’élimination des subventions aux combustibles fossiles inefficaces. Nous sommes intervenus pour dire que nous croyons que, sur ces éléments-là, le texte ne va pas assez loin.»
Le Canada peut s’attendre à rencontrer de la résistance, en particulier sur la question du charbon, alors que la guerre en Ukraine a complètement chambardé l’approvisionnement en matière d’énergie, mais le ministre affiche un bel optimisme. « Nos partenaires sont commis à éliminer les émissions provenant du charbon sur un horizon correspondant à l’Accord de Paris, malgré les défis d’approvisionnement en énergie et l’invasion illégale de l’Ukraine par la Russie », soutient-il.
Le ministre a par ailleurs cherché à préciser ses propos rapportés la veille sur le secteur gazier et pétrolier au Canada, alors que l’Inde fait pression pour un texte appelant à l’élimination de tous les combustibles fossiles: « On m’a demandé si le Canada allait éliminer la production (de combustibles fossiles). C’est très différent que de demander si nous appuierions la réduction de la dépendance aux combustibles fossiles. »
Lorsque la question est ainsi formulée, à savoir si le Canada appuierait justement un texte appelant à réduire l’utilisation et la dépendance aux combustibles fossiles, la réponse est effectivement tout autre. « Absolument, réplique-t-il aussitôt. Je n’ai entendu aucune référence à cette proposition, ce n’est pas dans le texte, mais nous sommes tout à fait favorables à la réduction de notre dépendance - soit au Canada ou collectivement à l’échelle planétaire - aux combustibles fossiles », affirme-t-il en prenant soin d’énumérer toutes les initiatives prises par son gouvernement pour atteindre ses objectifs de réduction des émissions de GES.
M. Guilbeault, un ex-militant environnementaliste, sait pertinemment qu’il marche sur une ligne fine, faite de telles nuances dans le contexte particulier du Canada, mais il semble convaincu que la crédibilité environnementale du Canada est en hausse: « Les gens voient que, malgré le fait que nous sommes le quatrième plus grand producteur de pétrole et de gaz - c’est un fait, que l’on aime ou que l’on n’aime pas - nous faisons beaucoup d’efforts à la fois au niveau national et au niveau international pour changer les choses. »
Présente à la COP27, la porte-parole bloquiste en environnement, Monique Pauzé, qualifie l’approche canadienne « d’asservissement manifeste » au secteur pétro-gazier, en faisant référence au refus exprimé par M. Guilbeault d’endosser l’idée d’éliminer tous les combustibles fossiles.
Selon elle, il est difficile de ne pas être cynique en constatant que « le Canada est classé 58e sur 60 à l’indice de performance climatique de 2023 » et qu’il s’apprête à autoriser des forages pétroliers exploratoires « en pleine zone de protection de biodiversité marine ».
« Les actions fédérales en environnement sont déplorables et en complète contradiction avec le discours du gouvernement. Lorsqu’il parlera de son » leadership environnemental », nous saurons dorénavant qu’il n’a plus aucune crédibilité en la matière », écrit-elle dans un communiqué.
Au final, Steven Guilbeault demeure convaincu de la nécessité et de l’utilité de telles réunions: « Nous sommes condamnés à travailler ensemble et à trouver des solutions ensemble. C’est un problème global et les solutions que nous trouvons doivent être globales. C’est difficile, c’est complexe et c’est compliqué, mais la plupart du temps, nous réussissons. »
Surtout, dit-il, que le temps file: « Il s’agit d’une décennie décisive pour rester sous la barre de 1,5 degré Celsius, pour que la planète reste vivable et pour éviter les effets néfastes des changements climatiques. Il ne peut plus y avoir de recul par rapport à notre ambition de rester sous la barre du 1,5 degré Celsius. »