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«Comme promis, nous ne voulions pas garder une minute de plus cette loi (...) et donc on annonce que ce sera levé aujourd'hui...»
Le premier ministre Justin Trudeau révoque l'application de la Loi sur les mesures d'urgence, au 10e jour où elle était en vigueur, puisque la menace d'autres barrages illégaux peut être contenue avec les outils normaux dont disposent les forces policières.
«Comme promis, nous ne voulions pas garder une minute de plus cette loi (...) et donc on annonce que ce sera levé aujourd'hui», a-t-il déclaré mercredi en point de presse.
M. Trudeau a écarté du revers de la main l'idée que son annonce pouvait constituer un aveu que les forces policières n'ont pas utilisé assez rapidement leurs pouvoirs normaux face aux occupations qui ont pris de l'ampleur, au cours des semaines précédentes.
«Au contraire. Ce qu'on a vu (...), c'est que les forces policières n'avaient pas les outils nécessaires pour déloger les occupations qui s'étaient implantées à Ottawa, au pont Ambassador, à Coutts et ailleurs. Et l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence a encouragé certaines personnes à quitter et, d'autre part, a permis aux forces de l'ordre de pouvoir en finir avec ces occupations», a-t-il fait valoir.
La mobilisation anti-mesures sanitaires et ses blocages, qui ont duré des semaines, ont pu être démantelés par les policiers, dans la capitale fédérale, au courant du week-end dernier.
Mais le premier ministre a tenu à souligner que toute menace n'a pas pour autant disparu à ses yeux.
«Même si l'urgence n'est plus là, la menace de manifestations illégales, de barricades ou d'occupations demeure. Mais on sait que les forces policières et les lois que nous avons en temps normaux seront suffisantes pour pouvoir empêcher d'autres occupations.»
Par ailleurs, M. Trudeau a relevé que, maintenant que l'utilisation de la Loi sur les mesures d'urgence se termine, une enquête publique sera menée prochainement. Un rapport d'enquête devra être déposé dans les 360 jours suivant la cessation des mesures d'urgence.
Un comité de surveillance conjoint entre le Sénat et la Chambre des Communes doit également être mis sur pied. À ce sujet, M. Trudeau a soutenu que son gouvernement «espère voir ce comité créé en début de semaine prochaine».
Il a indiqué que des conversations sont déjà entamées avec les partis d'opposition pour trouver un consensus sur la composition exacte du groupe de parlementaires.
Le premier ministre a tenu à ajouter qu'il considère que la transparence est «une partie importante» de la démarche de son gouvernement pour assurer la confiance des Canadiens en leurs institutions.
Réagissant à l'annonce de M. Trudeau, l'Association canadienne des libertés civiles a affirmé que la révocation «n'a que trop tardé», arguant que le gouvernement n'a jamais «atteint les seuils légaux requis» pour invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.
L'organisation promettait de livrer bataille contre le recours à cette loi d'exception, qui a été invoquée pour la première fois dans l'histoire du Canada.
Le regroupement ignore s'il poursuivra les procédures juridiques entamées, mais dit continuer de croire qu'il est important que les tribunaux se prononcent sur le seuil juridique requis pour invoquer la loi.
De leur côté, les conservateurs ont déclaré par communiqué que la révocation de l'état d'urgence est «la preuve» que M. Trudeau «avait tort» d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence et de maintenir le vote qui a eu lieu en Chambre, lundi soir.
La cheffe conservatrice par intérim, Candice Bergen, a aussi accusé les libéraux d'avoir laissé planer la menace d'un déclenchement d'élections dans la foulée de ce vote.
Selon elle, «rien» n'a changé depuis lundi soir, sauf d'inquiéter la population, de susciter une couverture médiatique «négative» et une «ridiculisation» du pays à l'international.
Mme Bergen a surtout dit vouloir savoir quand le gouvernement mettra fin aux mesures sanitaires et aux «restrictionsnon fondées sur la science».
Le chef néo-démocrate Jagmeet Singh, dont les troupes ont voté avec les libéraux pour ratifier le recours à la Loi sur les mesures d'urgence, s'est réjoui de la révocation, mercredi.
M. Singh a réagi, dans une déclaration écrite, en disant avoir soutenu depuis le début que la loi devait cesser d'être utilisée «dès qu'elle n'était plus nécessaire».
Le chef du NPD a dit croire que le pays doit désormais se doter d'un plan pour lutter contre «la montée de l'extrémisme et de la haine».
«Les menaces d'extrémisme, de radicalisation et de suprématie blanche n'ont manifestement pas été prises au sérieux, note-t-il. La circulation de la désinformation et le financement étranger contribuent à cette menace croissante.»
Le Bloc québécois, qui avait voté contre la motion de déclaration de situation de crise, s'est réjoui de la fin de l'application de Loi sur les mesures d'urgence, ce qui n'était «pas nécessaire» pour lever «le siège» d'Ottawa.
«C'est toutefois d'un rare cynisme de la part du premier ministre, moins de 44 heures après avoir imposé un vote mettant en jeu la chute du gouvernement. Il demeure de ce recours un autre effet grave: la création d'un premier précédent en 34 ans avec cette invocation historique de la Loi sur les mesures d'urgence», a déclaré le chef bloquiste Yves-François Blanchet dans un communiqué.
M. Blanchet a réitéré sa demande d'une commission d'enquête «indépendante et publique» sur ce qui a mené le gouvernement fédéral à imposer la loi.