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La Journée mondiale de l'abeille se veut un rappel du rôle essentiel et parfois encore méconnu de ce petit insecte pollinisateur, qui accomplit beaucoup plus pour la planète que de simplement produire du délicieux miel.
La troisième fin de semaine de mai est allongée grâce à un jour férié à plusieurs noms: fête de Dollard, Journée nationale des Patriotes ou la Fête de la Reine, en l'honneur de la défunte monarque britannique Victoria. Or, ce samedi, c'est une autre reine qui est célébrée, à savoir l'abeille, celle à qui la nature doit beaucoup.
Décrété Journée mondiale de l'abeille par l'Organisation des Nations unies, le 20 mai marque aussi l'anniversaire de naissance de celui qui est considéré comme le père de l'apiculture moderne, Anton Janša, qui vécut de 1734 à 1773.
La Journée mondiale de l'abeille se veut un rappel du rôle essentiel et parfois encore méconnu de ce petit insecte pollinisateur, qui accomplit beaucoup plus pour la planète que de simplement produire du délicieux miel.
«Quand on pense aux abeilles, on pense souvent à l'abeille à miel, celle qui fait des ruches, mais c'est une espèce parmi des milliers. À l'échelle mondiale, on recense entre 25 et 30 000 espèces d'abeilles; au Canada c'est 900 espèces et au Québec, on en trouve un peu plus que 300», indique André-Philippe Drapeau Picard, préposé aux renseignements entomologiques à l'Insectarium de Montréal.
On retrouve des abeilles partout dans le monde, aussi bien en Équateur qu'en Sibérie, au Yukon ou en Alaska, renchérit Alain Péricard, apiculteur biologique et auteur de «L'abeille et la ruche», dont la réédition vient d'atterrir en librairie.
La majorité de ces espèces sont solitaires, ne vivent pas en colonie et ne produisent pas de miel. D'ailleurs, l'abeille à miel n'est pas originaire d'Amérique du Nord; même si elle fait partie intégrante de nos vies depuis de nombreuses années, sa colocation avec des espèces indigènes mène parfois à quelques affrontements...
«Ces abeilles peuvent transmettre des pathogènes aux autres espèces, indique M. Drapeau Picard. Dans les endroits où il y a de grandes concentrations de ruches, il semble aussi y avoir de la compétition pour les ressources, c'est-à-dire le nectar et le pollen.»
Il y a déjà plusieurs années que l'importance de préserver les abeilles est connue en raison de leur rôle crucial dans la biodiversité mondiale.
«Une bouchée sur trois de tout ce qu'on mange est directement attribuable à la pollinisation, alors que 75 % des espèces végétales ont besoin de la pollinisation pour se reproduire, souligne M. Drapeau Picard. Les pollinisateurs contribuent à maintenir les populations végétales de même que les écosystèmes dont on dépend entre autres pour notre alimentation.»
Il est d'abord impossible de reproduire parfaitement tous les bienfaits que nous apportent les abeilles. «Dans certaines petites serres, il y a des agriculteurs qui imitent la pollinisation avec un pinceau, qu'ils promènent de fleur en fleur, pour reproduire le travail des abeilles, illustre M. Drapeau Picard. Mais à plus large échelle, on ne pourrait pas le faire.»
Les apports économiques du travail des insectes pollinisateurs sont évalués à 217 milliards $ US annuellement, précise-t-il.
Contrairement à ce que l'on peut croire, les abeilles à miel sont loin d'être en danger, soutient M. Péricard. «Les apiculteurs en prennent grand soin, dit-il. Durant l'hiver 2021-2022, les pertes des colonies au Québec ont atteint 50 %, du jamais vu. Mais en un an, les apiculteurs ont réussi à remonter le cheptel au niveau d'avant.»
Les abeilles sont des insectes «extrêmement résistants et tolérants face aux agressions environnementales», soutient l'auteur, rappelant que des traces des ancêtres de l'insecte datant de 100 millions d'années ont été retrouvées.
«Elles ont donc survécu à une extinction massive», poursuit M. Péricard, qui rappelle cependant que d'autres insectes pollinisateurs n'auront pas cette chance. Citant une étude, il indique que 40 % des espèces pourraient ne pas survivre à la prochaine décennie.
Ainsi, même si leur survie est menacée par l'utilisation à grande échelle de pesticides, par les effets des changements climatiques et par la destruction des habitats naturels au profit du développement urbain et des activités humaines, les pollinisateurs doivent être protégés, et chaque geste compte, soutient M. Drapeau Picard.
C'est pour cette raison que revient chaque année le défi Mai sans tonte ou le Défi pissenlit. «C'est quelque chose qui demande peu d'effort, mais des études ont démontré qu'en réduisant la fréquence de la tonte de gazon, à chaque deux ou trois semaines, c'est suffisant pour augmenter la diversité des insectes pollinisateurs tout en réduisant la présence des insectes nuisibles», indique M. Drapeau Picard.
Il est aussi possible de créer des habitats en plantant des espèces végétales productrices de nectar dans son jardin ou de laisser des feuilles mortes à certains endroits puisque 70 % des abeilles se nichent dans le sol, dans des cavités ou dans des tiges creuses. «La forêt, les plans d'eau, les jardins: tout ça bénéficie aux pollinisateurs, qui leur bénéficient à leur tour», note M. Péricard.
L'insecte à la tenue noire et jaune sera célébré de différentes manières au courant de la belle saison.
Déjà, cet été, l'Insectarium lancera une campagne d'observation et de suivi des insectes pollinisateurs en mesurant l'impact des gestes posés pour assurer leur survie, notamment en aménageant des habitats à leur attention sur l'île de Montréal et en périphérie.
Un festival des insectes pollinisateurs aura aussi lieu en août à l'Insectarium.
D'ici là, il est possible de découvrir trois œuvres d'art géantes inspirées des insectes au parc Frédéric-Back à Espace pour la vie.