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La ministre de la Défense, Anita Anand, a présenté lundi les excuses du gouvernement canadien aux victimes d’inconduite sexuelle dans l’armée, admettant qu’Ottawa n’avait pas réussi à protéger ces personnes qui se sont volontairement engagées pour protéger le pays.
Le gouvernement fédéral a cherché à émerger d’une période sombre dans le passé et la culture des Forces armées canadiennes, lundi, alors que les dirigeants politiques et militaires ont présenté formellement des excuses attendues depuis longtemps par les victimes d’inconduites sexuelles.
Diffusées en ligne depuis le Quartier général de la Défense nationale, à Ottawa, les excuses faisaient suite au règlement de 600 millions $ du gouvernement fédéral avec des dizaines de milliers de membres actuels et anciens des Forces armées qui ont subi un tel comportement pendant leur service.
Ces excuses sont aussi offertes tandis que le gouvernement libéral et les dirigeants militaires sont confrontés à des questions et à des critiques concernant leur incapacité apparente à traiter les allégations d’inconduites sexuelles, souvent criminelles, qui visent certains des plus hauts dirigeants de l’armée.
La ministre de la Défense, Anita Anand, a ouvert la marche de trois déclarations virtuelles, d’une quarantaine de minutes, qui à un moment donné étaient visionnées en ligne par environ 8000 personnes. Elle a reconnu que les gouvernements successifs n’avaient pas protégé ceux qui se sont volontairement engagés pour protéger le Canada.
« Je m’excuse auprès des milliers de Canadiens qui ont subi des préjudices parce que votre gouvernement ne vous a pas protégés, et que nous n’avons pas veillé à ce que les bons systèmes soient en place pour assurer la justice et la responsabilité », a déclaré la ministre Anand.
« Pendant beaucoup trop longtemps, votre gouvernement n’a pas consacré suffisamment de temps, d’argent, de personnel et d’efforts pour lutter contre le harcèlement sexuel, les agressions sexuelles et la discrimination fondée sur le sexe, le genre, l’identité de genre et l’orientation sexuelle dans les forces armées et au ministère. »
D’innombrables vies ont été gâchées, selon la ministre, à cause de l’inaction et de l’échec systémique au fil des ans, « un échec que nos Forces armées canadiennes, notre ministère et le gouvernement du Canada devront assumer à jamais ».
Mme Anand a succédé en octobre à Harjit Sajjan, qui avait été critiqué pour ne pas avoir fait plus pour lutter contre un tel comportement parmi les hauts gradés de l’armée. La nouvelle ministre a promis une action réelle: « les choses peuvent changer, elles doivent changer, et elles vont changer », a-t-elle dit.
Alors que la ministre a souligné le « dévouement de leaders incroyables au sein de notre équipe qui s’efforcent d’instaurer la confiance, la crédibilité et l’autorité morale », elle n’a pas fourni de détails spécifiques sur la façon dont un véritable changement se produira au sein de cette institution qui se maintient, selon certains, dans une « culture de sexualisation ».
La ministre Anand a déclaré lundi à La Presse canadienne qu’il s’agissait d’une omission délibérée. « Même si nous prévoyons (?) actuellement un certain nombre de mesures que nous prendrons pour réformer le système actuel, je voulais m’assurer qu’elles ne nuisaient pas aux excuses, a-t-elle expliqué. Parce qu’il s’agit d’un moment important pour les survivants et les plaignants. »
La réserviste Sam Samplonius, survivante d’agressions sexuelles dans l’armée et coprésidente de l’organisme de soutien « It's Not Just 700 », s’est félicitée des excuses présentées lundi par la ministre et les autres dirigeants, malgré l’absence d’initiatives concrètes.
« Une chose que nous avons entendue au sein de notre groupe, avant que les excuses ne soient présentées, c’est que les excuses, c’est bien, mais voyons un peu d’action, a-t-elle déclaré. Je pense donc que c’est ce que beaucoup de gens attendent. »
Plus tôt lundi, lors d’une conférence de presse virtuelle sur les garderies, le premier ministre Justin Trudeau a été questionné par les journalistes sur son absence lors de ces excuses officielles du gouvernement canadien.
« Nous regrettons profondément ce qui s’est passé, nous offrons nos excuses à tous les survivants et survivantes dans les forces armées canadiennes qui n’auraient jamais dû vivre les expériences comme ça », a-t-il dit.
M. Trudeau a admis que le gouvernement avait « beaucoup de travail à faire » pour « mettre fin à cette culture problématique, et parfois toxique, dans nos forces armées canadiennes ».
Les excuses sont présentées tandis que le gouvernement libéral et les dirigeants militaires luttent contre une vague d’allégations d’inconduite sexuelle impliquant des officiers supérieurs. Le gouvernement avait fait face à des appels de la Légion royale canadienne et d’autres pour présenter des excuses avant le délai d’un an et demi, jusqu’au mois dernier, accordé aux victimes pour soumettre leurs réclamations dans le cadre du règlement à l’amiable.
Près de 19 000 réclamations ont été soumises avant la fin de la période de réclamation le 24 novembre, bien que Jonathan Ptak, un avocat représentant les victimes dans certaines des six poursuites qui se chevauchent, affirme que les victimes peuvent toujours soumettre des demandes.
« Bien que la date limite de dépôt était le 24 novembre, l’administrateur du règlement a le pouvoir discrétionnaire de prolonger ce délai de 60 jours (jusqu’au 23 janvier 2022) en raison de circonstances exceptionnelles ou en raison du handicap d’un demandeur, a déclaré M. Ptak dans un courriel. À ce jour, de nombreuses réclamations tardives ont été acceptées pour examen. »
Plus de 5300 réclamations ont déjà été approuvées pour indemnisation tandis que près de 4900 personnes ont également demandé à participer à des « démarches réparatrices ».