Technologie

Fiasco SAAQclic: la SAAQ est «sincèrement désolée»

Ces excuses sont destinées aux Québécois, mais aussi à la ministre des Transports, Geneviève Guilbault.

Mis à jour

Publié

40060ea5a9796ade40e908f4dc6600513c2ce3e24c20633feed9603511882799.jpg Des gens font la file devant une succursale de la Société de l'assurance automobile du Québec, à Laval, le 6 mars 2023. LA PRESSE CANADIENNE/Ryan Remiorz (Ryan Remiorz | La Presse canadienne)

La Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ) a présenté jeudi, avec neuf mois de retard, un rapport annuel 2023 incomplet, qui affiche un lourd déficit de 122 millions $. 

En 2023, la SAAQ s'est lancée dans un virage numérique chaotique. Près de 15 000 plaintes ont été logées pendant l'implantation désastreuse de SAAQclic, soit trois fois plus qu'à l'habitude.

En conférence de presse au siège social de la SAAQ, à Québec, son président-directeur général, Éric Ducharme, a tenu à présenter ses excuses à la population québécoise, ainsi qu'à Geneviève Guilbault.

La ministre des Transports aurait commis un outrage au Parlement en omettant de déposer le rapport de la SAAQ dans les délais prescrits. Elle fait aujourd'hui l'objet d'une enquête de la Commission de l'Assemblée nationale.

«Nous sommes sincèrement désolés, a déclaré d'entrée de jeu le PDG Ducharme. Nous avons rencontré plusieurs difficultés suivant le déploiement (de SAAQclic). La performance de la Société a été grandement affectée.»

Depuis, la SAAQ travaille à «réduire les délais» et «corriger les anomalies technologiques». Ces redressements ont eu pour effet de retarder la production des états financiers, a expliqué M. Ducharme. 

«Je tiens en mon nom, et au nom de la Société, à m'excuser à tous les clients qui ont rencontré des désagréments», a-t-il insisté.

À VOIR ÉGALEMENT | SAAQclic: pourquoi Québec a-t-il engagé des «hackers éthiques» pour tester ses sites web?

Entre-temps, le déficit de la SAAQ s'est creusé; il est passé de 35,6 millions $ en 2022 à 122 millions $ en 2023. Ce sera un peu plus pour 2024, selon M. Ducharme. «Ce sont des chiffres importants», a-t-il reconnu.

Fait rarissime: les auditeurs indépendants n'ont pu confirmer la validité des informations sur les états financiers. 

«Nous n'exprimons aucune opinion sur les états financiers ci-joints de l'entité», écrivent à la page 101 la vérificatrice générale du Québec, Guylaine Leclerc, et la firme BDO Canada. 

La mise en place de SAAQclic est en cause; durant la crise, le suivi des transactions a été «moindre», ce qui a empêché les auditeurs de faire un examen de la situation financière respectant les normes en vigueur.

«Dans un contexte d'environnement hautement informatisé, nous n'avons pas été en mesure d'obtenir des éléments probants suffisants et appropriés pour nous assurer (...) de l'existence et de l'exactitude d'un nombre important de postes», affirment-ils.

M. Ducharme, un ancien secrétaire du Conseil du trésor, a dit en conférence de presse trouver la situation «difficile à accepter». 

Guilbault réplique

Lors d'une prise de parole au Salon rouge jeudi, la ministre Guilbault est passée à l'offensive, s'en prenant à la SAAQ, qui ne l'aurait pas personnellement avisée des difficultés entourant la production des états financiers.

«Je suis (...) insatisfaite de ce qui se passe à la Société de l'assurance automobile du Québec», a-t-elle déclaré.

«Une information de cette nature-là, considérant les conséquences et la gravité de ne pas se conformer à des lois, (...) mérite une communication claire et directe à la personne qui est ultimement imputable, la ministre des Transports», a-t-elle ajouté.

«Elle est à blâmer, a tranché en point de presse la porte-parole de Québec solidaire, Ruba Ghazal. Si on est ministre, on ne peut pas toujours changer la tête des dirigeants puis, après ça, dire: "Ce n'est pas de notre faute, on n'a rien à avoir là-dedans".»

Dans les rangs libéraux, on parle d'un rapport «accablant» et on s'indigne du comportement de Mme Guilbault. «Il y a une désinvolture dans l'attitude de Geneviève Guilbault», a dénoncé le député libéral André Fortin, jeudi.  

«Il y a eu des dépassements de coûts monstres à la SAAQ. Il y a eu des gens qui ont attendu dehors pendant des heures et des heures pour avoir des services de la SAAQ. (...) Il me semble que d'avoir un peu de transparence, ce serait la moindre des choses», a-t-il affirmé.

«Qu'est-ce que Mme Guilbault sait qu'on ne sait pas sur le fiasco de SAAQclic? Elle sait certainement beaucoup plus de choses que nous», a ajouté le député péquiste Joël Arseneau.

Caroline Plante

Caroline Plante

Journaliste