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Louise Avon, brutalement assassinée le 31 mars 2022 à Sainte-Agathe-des-Monts par son conjoint en proie à un délire psychotique induit par une consommation de crack, serait possiblement toujours en vie si l’État n’avait pas «lamentablement échoué dans son rôle de protection du public».
Cette expression est celle utilisée par le juge Sylvain Lépine, de la Cour du Québec, dans sa décision rendue mercredi de condamner Pascal Arseneault à huit ans de pénitencier après que ce dernier eut reconnu sa culpabilité à l’accusation d’homicide involontaire coupable.
L’homme de 50 ans et sa conjointe étaient ensemble depuis 12 ans au moment du féminicide et étaient propriétaires d’une compagnie d’aménagement paysager.
Pascal Arseneault avait fait une rechute de consommation de crack durant la pandémie à partir du printemps 2021, après 12 ans d’abstinence, entraînant des comportements erratiques et violents. Puis, entre le 14 octobre 2021 et le 29 mars 2022, soit sur une période de cinq mois et demi, les policiers ont été appelés à intervenir pas moins de 13 fois auprès du quinquagénaire qui fut hospitalisé à huit reprises durant cette période.
Le juge Lépine note que «aucune de ces interventions policières n'a mené à la détention de Monsieur Arseneault malgré les infractions commises à répétition».
Le juge souligne que «même si le travail des policiers n'est pas de tout repos, il est franchement incompréhensible et même choquant qu'entre le 14 octobre 2021 et le 29 mars 2022 pas moins de 13 interventions policières n'aient mené à aucune action concrète pour éviter le pire».
«Encore plus choquant, quelques jours avant l'homicide, le 29 mars 2022, l'accusé est arrêté chez lui en pleine crise et en délire et amené à l'hôpital. II sera libéré six heures plus tard», poursuit le juge.
Deux jours plus tard, le soir fatidique du 31 mars, l’homme à nouveau en plein délire narcotique devait poignarder sa conjointe à neuf reprises, mettre le feu à leur maison et ensuite s’asseoir pour regarder celle-ci brûler sans appeler les services d’urgence. À l’arrivée des services d’urgence, il était incohérent, désorganisé et disait être un ninja et que la victime était un robot. Il était alors en possession de 16 grammes de crack.
C’est en procédant à l’analyse de tous ces faits que le juge Lépine conclut que «l'absence de coordination entre les interactions des policiers et le système de santé ont fait en sorte que l'État a lamentablement échoué dans son rôle de protection du public».
Le magistrat va encore plus loin en généralisant les conséquences de ce problème à l’ensemble de la société: «L'absence d'un programme cohérent en matière de santé mentale et d'interventions policières réfléchies menace la sécurité du public.»
Sa conclusion est sans appel: «Une prise en charge de l'accusé aurait dû être mise en action pour éviter un tel drame.»
Pascal Arseneault avait été jugé apte à comparaître lors d’une première évaluation psychiatrique. Une seconde expertise quelques mois plus tard visant à établir la responsabilité criminelle avait conclu que l’accusé avait souffert d’un «trouble psychotique induit par la consommation de crack» et qu’au moment de la tragédie «il était aux prises avec des convictions envahissantes délirantes qui l’ont mené à poser les gestes qui lui sont reprochés».
La psychiatre avait toutefois écarté l’idée de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux puisque l’état psychotique de l’accusé «était induit par la forte consommation de crack». Pascal Arseneault avait d’ailleurs reconnu avoir consommé une forte quantité de crack lorsque les policiers l’avaient appréhendé. Une telle consommation étant volontaire, ses conséquences ne peuvent ouvrir à une défense de non-responsabilité criminelle.
En date de mercredi, Pascal Arseneault avait purgé 639 jours de détention préventive. Il reste donc six ans et trois mois à purger à la peine de huit ans suggérée conjointement par la défense et la Couronne à la suite du plaidoyer de culpabilité de celui-ci.