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«Il essaie de montrer au niveau national que la Russie est forte et puissante, mais aussi stable.»
Au plus fort de la guerre froide, une déclaration comme celle du président russe Vladimir Poutine avertissant l'Occident que son pays est militairement et techniquement prêt à déployer son arsenal nucléaire aurait ébranlé le monde entier.
Aujourd'hui, selon une experte canadienne, ces propos sont révélateurs de la relation profondément antagoniste entre la Russie et l'Occident, mais pour l'instant, ils ne constituent pas un signe clair qu'une attaque nucléaire est plus proche qu'elle ne l'était lorsque la guerre en Ukraine a éclaté il y a plus de deux ans.
«L'invasion de l'Ukraine par la Russie nous a fait monter d'un cran», a dit Jane Boulden. Elle est professeur au Collège militaire royal du Canada et membre du Centre for International and Defence Policy de l'Université Queen's.
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Selon Mme Boulden, l'objectif de M. Poutine devrait être un message à la fois national et international, alors que l'élection présidentielle russe, qu'il est pratiquement certain de remporter, est sur le point de débuter le 15 mars. Il est probable qu'il obtienne un nouveau mandat de six ans, qui viendrait s'ajouter aux 24 ans de règne qu'il exerce déjà sur le pays.
«Il essaie de montrer au niveau national que la Russie est forte et puissante, mais aussi stable. Pour le reste du monde, le message est le suivant: "n'oubliez pas que nous sommes une puissance nucléaire"», ajoute-t-elle.
M. Poutine a déjà tenu des propos similaires par le passé, mais ce que les experts observent de près, c'est s'il y a un changement sur le terrain. Mme Boulden indique que les États-Unis surveillent de près les mouvements de troupes et d'équipements en Ukraine qui pourraient laisser présager un déploiement nucléaire.
Ira Helfand, membre du groupe de pilotage international de la Campagne internationale pour l'abolition des armes nucléaires (ICAN), estime toutefois que les menaces doivent être prises au sérieux, car elles soulignent la situation extraordinairement dangereuse dans laquelle se trouve le monde.
«Les armes nucléaires ne devraient être à la disposition d'aucun pays pour être utilisées de cette manière», mentionne-t-il, ajoutant que les puissances nucléaires doivent entamer des négociations pour adhérer au traité sur l'interdiction des armes nucléaires et éliminer leurs arsenaux nucléaires. Bien que cela puisse sembler contre-intuitif, le moment est peut-être bien choisi pour entamer ce processus, alors que les tensions sont vives entre les États-Unis et la Russie.
«Nous devons nous rappeler qu'il y a eu une période de tension similaire en 1962, après la crise des missiles de Cuba, et en 1983, au plus fort de la guerre froide, et que ces deux périodes ont été suivies de progrès rapides dans le contrôle de la course aux armements», explique M. Helfant. Il suggère qu'il est temps pour les nations d'essayer de parvenir à un accord.
Le Canada, en tant que pays non nucléaire, n'aura probablement qu'un rôle limité à jouer dans la conclusion d'un tel accord.
«Ce n'est pas que nous ne devons pas essayer, mais il est peu probable que si le Canada prenait l'initiative de réunir les deux parties, cela changerait quelque chose», explique Mme Boulden.
Toutefois, si un accord était conclu, le Canada pourrait se tailler un rôle.
«Traditionnellement, lorsqu'il a eu un rôle à jouer dans ces domaines, le Canada l'a fait dans des domaines où il possédait une expertise. Par exemple, comment vérifier un traité, comment s'assurer que les deux parties s'y conforment», explique-t-elle. «Nous n'avons pas d'armes nucléaires, mais nous disposons d'une grande expertise technique dans ce domaine.»
Tout accord dépendrait des puissances nucléaires et de leur volonté de négocier, dit-elle, et pour l'instant, les avertissements de Poutine n'indiquent aucun mouvement sur ce front.