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La demande d’autorisation pour déposer une action collective en dommages-intérêts des locataires du Faubourg Mena’Sen contre les cinq ex-administrateurs du complexe de logements de Sherbrooke sera entendue le 6 décembre prochain.
Selon les locataires et leur avocat, Me Louis Fortier, «la dissolution du Faubourg Mena’sen s’est faite selon un stratagème trompeur, voire frauduleux».
Les locataires estiment que les cinq ex-administrateurs se sont appropriés de façon illégale les profits de la vente des immeubles du Faubourg, en plus de l’encaisse, pour une somme totale d’un peu plus de 19 millions de dollars. Le complexe compte un peu plus de 170 logements.
Parmi les nombreuses accusations qui justifient leur demande, les locataires estiment que les ex-administrateurs ont violé la Loi sur les compagnies du Québec, de même que les règlements internes.
Par l’entremise de leur avocat, le groupe de locataires estime que les ex-administrateurs ont mal agi depuis 10 ans, notamment «en cachant aux locataires le statut juridique et les objets du Faubourg Mena’sen, en cachant aux locataires le fait qu’ils pouvaient avoir droit à une aide financière, à une subvention ou encore en exigeant des locataires qui avaient obtenu une aide financière ou une subvention qu’ils n’en parlent pas aux autres locataires».
Une cinquantaine de locataires étaient d’ailleurs réunis, mercredi après-midi, au centre Julien-Ducharme de Sherbrooke, pour une mise à jour du dossier. Ils ont pris le temps de chanter une reprise bien à eux d’une chanson à succès de la Bottine souriante à la sauce Mena’Sen. Plusieurs d’entre eux ont semblé heureux et surpris de voir que le dossier pouvait franchir une autre étape dès le mois de décembre.
Dans une déclaration assermentée datant du 27 juillet dernier et déposée à la cour, l’un des ex-administrateurs du Faubourg, l’avocat Serge Dubois, attaque la demande en autorisation d’action collective des locataires sur plusieurs fronts. Le juge qui entendra les parties en décembre prochain aura en mains ces documents pour déterminer s’il autorise ou non la demande des locataires et de leurs représentants.
Dans un premier temps, Me Dubois rapporte avoir été membre du Faubourg Mena’Sen au cours des décennies entre 1980 à 2022 et administrateur au cours des décennies entre 1990 à 2022.
Les locataires reprochent aux ex-administrateurs d’avoir omis d’aviser les locataires admissibles à des subventions de la SCHL d’une possible vente des immeubles, or pour Serge Dubois, «au moment des actes […] aucun locataire ne bénéficiait de subventions de la SCHL», la banque de réserve de ces subventions ayant été épuisée en 2021.
Il s’en prend aussi à Johanne Proulx, une locataire du Faubourg, que le groupe de locataires souhaite désigner comme demanderesse dans cette affaire.
«Il est important de préciser que la Demanderesse-Locataire Madame Proulx […] n’a jamais bénéficié d’une subvention de la SCHL. De plus, ni Madame Proulx, ni aucun des locataires n’étaient des membres de Mena’Sen lors des événements reprochés», écrit Serge Dubois.
Les 5 ex-administrateurs auront l’occasion de se défendre le 6 décembre prochain. Joint au téléphone, Me Serge Dubois a décliné notre demande d’entrevue.
Dans une requête datée aussi du 27 juillet dernier, les nouveaux propriétaires du Faubourg Mena’Sen demandent pour leur part d’être exclus des procédures judiciaires en lien avec la vente du complexe de logements. Les acheteurs, une compagnie à numéro dont le nom est 9254-1556 Québec inc., estiment que les locataires visent avec l’action collective le versement par les vendeurs de dommages-intérêts. L’homme d’affaires David Busque est le président de cette compagnie à numéro.
«À l’évidence […] la présence de 9254 n’est absolument pas nécessaire afin de permettre la solution complète de ce litige, ni pour lui opposer le jugement à être rendu dans ce dossier», écrivent les avocats des acheteurs.
Le débat judiciaire qui approche pourrait avoir un impact sur les acheteurs, puisque les locataires du Faubourg, dans leur demande, souhaitent l’annulation complète de l’acte de vente. Pour les acheteurs, toutefois, les locataires et leurs représentants n’ont pas l’intérêt juridique suffisant pour réclamer cette annulation.
«Les demanderesses n’allèguent aucun motif permettant au tribunal de déclarer l’acte de vente nul», peut-on lire. Les locataires ne sont toutefois pas du même avis et accusent les acheteurs d’avoir fermé les yeux.
«Lorsqu’un de ses représentants a demandé à Me Serge Dubois où irait l’argent que l’Acheteur-Mis en cause versait à la personne morale du Faubourg Mena’sen pour acheter la totalité des immeubles appartenant au Faubourg Mena’sen, il s’est fait répondre sèchement de "se mêler de ses affaires" […] Ce représentant n’a pas posé d’autres questions faisant ainsi preuve d’aveuglement volontaire. Qui plus est, il a accepté de participer au "Pacte de silence" imposé par Me Serge Dubois», écrivent les locataires, par l’entremise de leur avocat, Me Louis Fortier. Ces allégations n’ont pas encore été testées devant le tribunal.
Dans leur requête, les avocats des acheteurs rapportent aussi que la compagnie subit des préjudices importants en étant mis en cause dans cette demande d’action collective. Les acheteurs auraient investi, en date de juillet dernier, 750 000$ dans les installations du Faubourg. Busque et ses partenaires projetaient aussi, selon la requête, d’y investir entre 10 et 15 millions de dollars «afin de rendre disponibles de logements abordables et un milieu de vie écoresponsable aux locataires».
«En raison de sa mise en cause forcée dans le présent litige et de la demande en annulation de l’acte de vente, les projets susmentionnés ont dû être suspendus. En effet, il n’est pas possible pour 9254 (l’entreprise) d’obtenir un financement et d’investir d’importantes sommes pour ces projets alors qu’elle est impliquée dans une procédure judiciaire qui pourrait, bien que cela soit peu probable, se solder par une annulation de la Vente», peut-on lire dans la requête.
Contacté par Noovo Info, David Busque a dit préféré attendre que la demande d’autorisation soit entendue par le juge, en décembre, avant d’accorder des entrevues. L’homme d’affaires de Sherbrooke a réitéré n’avoir rien à se reprocher dans cette affaire et compte bien offrir sa version des faits au moment opportun.