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Les municipalités côtières sont laissées à elle-même dans le dossier de l'érosion des côtes.
Les municipalités côtières sont laissées à elles-mêmes dans le dossier de l'érosion des côtes. C'est ce qu'affirme le plus récent rapport de la commissaire au développement durable, Janique Lambert, déposé mercredi. Résultat: elles n'ont pas les moyens de s'adapter et des bâtiments peuvent être construits en zone à risque.
Le rapport indique qu'une majorité des 24 municipalités concernées n'ont pas de carte qui identifie les zones à risque d'érosion côtière et d'inondation. Or, c'est le ministère de la Sécurité publique qui a la responsabilité de produire de telles cartes.
«L'absence de cartes de zones de contraintes pour l'érosion et la submersion côtières risque d'accroître l'exposition des bâtiments et des infrastructures à ces aléas pour les années à venir, étant donné que le développement de bâtiments et d'infrastructures peut se poursuivre dans des zones à risque», peut-on lire dans le rapport.
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Également, des outils développés par le ministère de l'Environnement pour faire face au phénomène ne sont pas accessibles à toutes les municipalités. Par exemple, seulement deux d'entre elles ont été intégrées à une plateforme permettant d'estimer les dommages causés par l'érosion et la submersion côtières sur leur territoire.
Le rapport soutient aussi que peu de municipalités ont l'accompagnement et le soutien financier nécessaires pour s'adapter aux risques liés à l'érosion et à la submersion côtières.
«Les municipalités côtières ne possèdent pas toutes, à elles seules, les ressources techniques et financières pour faire face aux enjeux majeurs soulevés par l'érosion et la submersion côtières. Ainsi, une démarche d'accompagnement soutenue par les ministères et organismes concernés par ces enjeux, notamment auprès des MRC et des municipalités, est essentielle afin de les habiliter dans la prise en charge des risques», explique la commissaire.
Le rapport reproche également aux ministères concernés que leur gestion des risques liés à l'érosion et à la submersion côtières «présente des lacunes et n'est pas efficace».
Les ministères «travaillent majoritairement de façon sectorielle et ne couvrent pas certains risques importants», affirme Mme Lambert.
La commissaire déplore aussi que le gouvernement n'investisse pas assez de ressources pour la prévention. «Plusieurs spécialistes disent que c'est toujours moins cher de prévenir que de guérir. Et dans ce cas bien précis, chaque dollar investi en prévention et en adaptation, c'est 13 $ à 15 $ d'évité en frais engagés pour corriger les conséquences subies», explique-t-elle en point de presse.
Entre 2018 et 2023, près de 80 % des dépenses du ministère des Transports en lien avec l'érosion et la submersion côtières touchant des routes ont été effectuées à la suite de «dommages subis plutôt qu'en prévention».
Selon le Plan pour une économie verte 2030, si aucune mesure d'adaptation n'est mise en place, des dommages causés par l'érosion pourraient représenter des coûts potentiels de 1,5 milliard $ d'ici 2065.
La commissaire n'épargne pas non plus le gouvernement sur la protection des milieux humides. Elle lui reproche de mettre en péril l'atteinte de l'objectif `d'aucune perte nette' qui se trouve dans la Loi concernant la conservation des milieux humides et hydriques adoptée en 2017.
«Si on veut protéger les milieux humides, il faut tout d'abord éviter de les détruire», a lancé Janique Lambert en point de presse.
Le rapport indique que toute «demande d'autorisation ministérielle relativement à un projet dans des milieux humides et hydriques doit être accompagnée d'une démonstration qu'il n'y a pas, pour les fins du projet, d'espace disponible ailleurs sur le territoire compris dans la MRC concernée ou que la nature même du projet nécessite qu'il soit réalisé dans ces milieux».
Or, la commissaire rapporte que près de 70 % des autorisations ministérielles «sont accompagnées d'une justification de réaliser le projet à l'endroit prévu plutôt que d'une réelle démonstration de l'impossibilité d'éviter de porter atteinte aux milieux humides et hydriques comme l'exige la Loi sur la qualité de l'environnement».
Le ministère de l'Environnement «n'utilise pas de manière efficace les mécanismes prévus pour assurer la protection et l'utilisation durable des milieux humides et hydriques, malgré les pertes importantes de ces milieux que le Québec a connues depuis plusieurs décennies», indique-t-on dans le rapport.
Le ministre de l'Environnement, Benoit Charette, a été questionné sur le sujet, mercredi, durant l'étude des crédits par la députée libérale Virginie Dufour, qui lui reproche de ne pas appliquer la loi.
«On applique la loi», a-t-il rétorqué.
«La loi et la réglementation ont été largement bonifiées dans les dernières années, car elles comportaient des lacunes. (...) Déjà dans les dernières semaines, on a fait des annonces importantes qui répondent à certains questionnements. La commissaire n'a pas pu en prendre compte dans son rapport qui était sans doute déjà terminé à ce moment-là», a-t-il expliqué.
Questionné à savoir à quelles annonces le ministre faisait référence, son bureau a pointé la révision du Programme de restauration et de création de milieux humides et hydriques qui possède une enveloppe de 113 millions $.
La Presse révélait en février que seulement 3 % de cet argent a été dépensé depuis 2017.