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La reine a célébré, dimanche, le 70e anniversaire de son accession au trône du Royaume-Uni... et du Canada. Elle a su adapter son rôle traditionnel de monarque aux démocraties libérales pour laisser son empreinte sur le Canada, disent des experts.
Le professeur Andrew Heard, du département des Sciences politiques de l'Université Simon-Fraser, dit qu'elle a su démontrer aux Canadiens qu'elle était bien leur reine.
«Elle a embrassé son rôle de reine du Canada d'une manière politique et culturelle, souligne-t-il. Grâce à elle, le Canada a pu se sentir comme étant un pays en soi, même s'il est issu du colonialisme britannique.»
La relation entre Elizabeth II et le Canada a commencé bien avant son accession au trône. Elle est venue au pays à 31 reprises, si on compte les fois où elle n'a fait qu'escale, depuis son couronnement en 1952.
Le professeur Heard pense qu'elle éprouve une véritable affection pour le Canada.
«Elle a visiblement aimé ses visites ici, dit-il. Cela a aidé les Canadiens à se sentir uniques, extraordinaires et à penser qu'ils sont un peuple qui vaut la peine d'être connu.»
Au cours de son règne, elle a partagé les joies et les peines canadiennes. En 1959, elle s'est arrêtée à Pointe-du-Chêne, au Nouveau-Brunswick, pour rencontrer les familles de pêcheurs morts dans une tempête.
Elizabeth II est venue à Ottawa en 1982 pour signer la proclamation de la Loi constitutionnelle canadienne. Six ans auparavant, elle avait ouvert les Jeux olympiques de Montréal à titre de cheffe d'État du pays hôte.
Elle n'a pas toujours été la bienvenue, particulièrement au Québec. En octobre 1964, sa visite dans la ville de Champlain avait été marquée par des manifestations sévèrement réprimées par la police locale, un épisode désormais connu sous le nom de «Samedi de la matraque» dans l'histoire de la province.
À sa dernière visite, en 2010, la monarque s'était exclamée: «C'est bon d'être chez soi!» à la foule rassemblée à Halifax.
Pour Mel Cappe, membre émérite de la Munk School of Global Affairs and Public Policy de l'Université de Toronto, Elizabeth II a su tisser des liens avec le pays par ses interactions avec la population au moment de ses visites.
«Je l'ai vue en personne quatre fois, lance-t-il. Je peux m'en rappeler chaque instant.»
Il souligne aussi la passion de la reine pour le Commonwealth.
«L'empire britannique était en déclin. Elle a tiré un lièvre de son chapeau pour maintenir les liens unissant les nations du Commonwealth.»
Sarika Bose, une chargée de cours de l'Université de la Colombie-Britannique, dit qu'Elizabeth II est la seule des 43 monarques à être perçue comme une reine universelle. Elle la décrit comme étant un «patrimoine vivant», une constante présence rassurante dans les hauts et les bas de la vie.
Le professeur Heard dit que l'appui pour la monarchie au Canada se fonde sur le respect personnel qu'éprouvent de nombreux Canadiens envers la reine.
Cet appui se maintiendra-t-il lorsque son fils Charles lui succédera au trône ? C'est une question à laquelle il est difficile de répondre, reconnaît l'universitaire.
«Il y a moins de respect pour le prince Charles. La perspective de le voir devenir notre roi n'emballe pas autant les Canadiens», constate-t-il.
Le doyen de la Judge Business School de l'Université de Cambridge, Mauro Guillen, croit que certains mettront en doute la pertinence de la monarchie au Canada lorsque Charles deviendra roi.
«Persuader la population qu'il sera aussi bon que sa mère dans ce rôle sera une tâche très difficile pour le prince Charles.»