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Une dizaine d’organismes québécois se sont joints mardi au mouvement pour la suspension automatique des casiers judiciaires, initié en novembre dernier par la fondation de la Coalition nouveau départ (CND).
*Voyez l'entrevue qu'a réalisée notre animatrice Noémi Mercier avec l'avocate en droit criminel Me Nada Boumeftah, également vice-présidente de la Clinique juridique Saint-Michel.
Le regroupement compte maintenant 85 membres de partout au pays, pour la plupart des associations d’avocats et des organismes communautaires.
Ce que la CND propose, c’est de sceller automatiquement les casiers judiciaires après que le contrevenant eut purgé sa peine et eut passé quelques années dans la communauté sans avoir récidivé. Cette mesure ne toucherait pas les criminels condamnés à perpétuité. De plus, la police et les juges auraient encore accès aux informations.
En ce moment, il est possible de faire soi-même une demande de suspension de son casier après cinq ou dix ans, dépendamment du type de procès. Cela demande de débourser 50 $ et de faire une série de démarches bureaucratiques.
«Il est impératif selon nous que, tant sur le plan des coûts que sur le plan de l’accessibilité, le régime soit simplifié», a fait valoir la présidente de l’Association québécoise des avocats et avocates de la défense, Me Marie-Pier Boulet, lors d’une conférence de presse à Montréal.
Selon la coalition, la présence d’un casier judiciaire crée de la discrimination et marginalise les gens qui tentent de réintégrer la société.
«Le type de vérification qui est souvent demandé est pour des fins d'emploi, de logement, d'assurances», a expliqué Me Laura Berger, de l'Association canadienne des libertés civiles. Mais «en général, il n’y a pas de limite», si bien que certains peuvent même devoir divulguer leurs antécédents «lorsqu’ils essaient de trouver du logement dans des centres de longue durée» ou de faire du bénévolat.
Au Québec, « le Code civil permet aux compagnies d’assurance d’imposer des primes plus élevées », a ajouté le président de la Société John Howard du Québec, Jean-Claude Bernheim, qui n’hésite pas à qualifier la situation de «discrimination systémique».
«Le fait d’avoir un emploi est un facteur protecteur important contre la récidive», a plaidé Mme Berger, non seulement grâce à l’obtention d’un salaire, mais aussi par les liens sociaux qui s’y créent.
Elle a ajouté qu’après qu’une personne eut passé plusieurs années sans ennuis, les chances statistiques qu’elle récidive «diminuent de façon importante».
Ce n’est pas un secret, les minorités racisées représentent une part disproportionnée des personnes incarcérées.
La présidente de l’Association de la communauté noire de l’Ouest de l’île, Joan Lee, a appelé à combattre «le racisme systémique qui fait mal à notre communauté de tant de manières différentes».
«Une réforme du Code criminel est clairement nécessaire, et cela enrichirait notre communauté.»
Pour les personnes racisées, «c’est déjà difficile de trouver un bon emploi», a-t-elle dit, et quand on a en plus des antécédents judiciaires, «c’est une autre difficulté qui s’ajoute».
D’après elle, «une fois qu’ils obtiennent des emplois, ils sont plus enclins à redonner à leur communauté».
Aleksandra Zajko, de la Société Elizabeth Fry, a aussi rappelé que les femmes judiciarisées «sont issues pour la plupart de milieux défavorisés» et que le système actuel crée «une situation d’injustice qui a porté préjudice depuis de trop longues années à la réintégration sociale de ces femmes».
Les organismes qui se sont joints au regroupement sont l’Association des avocats de la défense de Montréal-Laval-Longueuil, l’Association des avocats de la défense de Québec, l’Association des avocats et avocates en droit carcéral du Québec, l’Association de la communauté noire de l’Ouest de l’île, l’Association des services de réhabilitation sociale du Québec, l’Association québécoise des avocats et avocates de la défense, la Clinique juridique de Saint-Michel, la Société Elizabeth Fry du Québec et la Société John Howard du Québec.