Alors que le Japon s’apprête à célébrer le 13e anniversaire de la pire catastrophe nucléaire de son histoire, l’homme chargé de la dépollution déclare que son équipe se bat pour obtenir un échantillon au cœur des débris radioactifs du site.
Le projet de nettoyage des vestiges de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi, qui dure depuis des décennies, se prépare à retirer les débris de combustible endommagé des réacteurs de la centrale, mais une grande partie de ce qu’ils contiennent reste un mystère.
La clé pour percer ce mystère — et trouver comment le nettoyer — est un échantillon de combustible fondu provenant de l’intérieur d’un réacteur, a déclaré Akira Ono, responsable du démantèlement de la Tokyo Electric Power Company Holdings, dans une interview accordée à l’Associated Press.
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Obtenir cet échantillon reviendrait à pénétrer «le donjon principal du château» dans la bataille du démantèlement, a expliqué M. Ono. «Nous avons accompli un certain nombre de choses, mais il nous reste encore beaucoup à faire pour nous attaquer à la tâche sans précédent qui consiste à retirer le combustible fondu.»
Le 11 mars 2011, un tremblement de terre de magnitude 9 et un tsunami ont endommagé les systèmes de refroidissement de la centrale de Fukushima Daiichi, provoquant la fusion de trois de ses réacteurs, le rejet de radiations et l’exode de milliers de résidents. Certaines zones proches de la centrale sont toujours invivables.
Il reste environ 880 tonnes de combustible nucléaire fondu hautement radioactif dans les trois réacteurs endommagés, mais personne ne sait dans quel état se trouve le combustible fondu ni où il est tombé exactement dans les réacteurs. Ces données sont cruciales pour élaborer un plan visant à le retirer en toute sécurité, a déclaré M. Ono.

Depuis qu’une sonde robotisée de 2019 a regardé pour la première fois à l’intérieur du réacteur n° 2 — le moins endommagé — TEPCO a essayé d’en extraire une petite quantité de débris fondus à l’aide d’un bras robotisé. Cet effort a été retardé pendant plus de deux ans, car l’équipe s’efforce de trouver un moyen de faire passer le robot à travers l’épave. La prochaine tentative de l’équipe aura lieu en octobre, en utilisant un dispositif déjà testé qui ressemble à une canne à pêche pour extraire un échantillon préliminaire, en attendant les améliorations techniques du bras robotique, a affirmé M. Ono.
Le mois dernier, la centrale a effectué son premier vol de drone dans le réacteur le plus touché, le réacteur n° 1, afin d’examiner les débris fondus, mais a dû annuler une deuxième journée d’exploration après la défaillance d’un robot secondaire qui aidait à la transmission des données.
«Nous sommes novices dans ce domaine et nous rencontrons parfois des problèmes imprévus sur le terrain. Mais ce sont des leçons précieuses pour nos prochaines étapes», a dit M. Ono.
Les critiques estiment que l’objectif de nettoyage sur 30 à 40 ans fixé par le gouvernement et TEPCO est trop optimiste.
Le manque de données, de technologies et de plans sur ce qu’il faut faire du combustible fondu mortellement radioactif et des autres déchets nucléaires empêche d’avoir une vision claire de l’état du complexe de la centrale et de ses environs à la fin de la décontamination.
M. Ono a déclaré que le rôle de la compagnie était de faire de son mieux pour relever les défis un par un et en toute sécurité.
En août dernier, la centrale a commencé à déverser de l’eau traitée dans la mer, ce qui, selon M. Ono, constitue un grand pas en avant. Si la prochaine tentative de récupération d’un échantillon du réacteur n° 2 réussit, il s’agira d’un «grand pas» et d’un «changement d’étape majeur», a-t-il soutenu.
Fukushima Daiichi rejette actuellement un quatrième lot de 7800 tonnes d’eau. Jusqu’à présent, les résultats des prélèvements quotidiens d’eau de mer ont été conformes aux normes de sécurité, mais ce plan controversé a suscité des protestations de la part des pêcheurs locaux et des pays voisins, en particulier la Chine, qui a interdit les importations de fruits de mer japonais.
TEPCO a fini de retirer toutes les barres de combustible usé d’une piscine de refroidissement du réacteur n° 4 en 2014 et de la piscine du réacteur n° 3 en 2021. Elle prévoit d’achever le retrait des barres des piscines n° 1 et n° 2 d’ici 2031.
