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M. Miller a reconnu que le projet de loi est effectivement une promesse électorale, mais ce qu'il appuyait, c'est «la loi qui a été présentée au comité».
Des députés libéraux de la région de Montréal, dont un ministre, menacent de voter contre le projet de loi C-13 qui vise à moderniser la Loi sur les langues officielles.
«Vous allez voir en temps et lieu», a d'abord répondu le ministre des Relations Couronne-Autochtones, Marc Miller, lorsque questionné mercredi à son arrivée à la réunion du caucus libéral à savoir s'il votera en faveur de la pièce législative.
M. Miller a reconnu que le projet de loi est effectivement une promesse électorale, mais ce qu'il appuyait, c'est «la loi qui a été présentée au comité». Or, le gouvernement est minoritaire et «ne contrôle pas la donne nécessairement», a-t-il dit, en expliquant que certains amendements du Bloc québécois et du Parti conservateur «minent complètement l'esprit de la loi».
Le cabinet applique le principe de solidarité ministérielle et vote de la même façon. Autrement dit, la déclaration de M. Miller implique qu'il pourrait ne pas respecter ce principe si le cabinet vote en faveur du projet de loi ou que le gouvernement voterait carrément contre C-13.
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Déjà, le président de la Société de l'Acadie du Nouveau-Brunswick, Alexandre Cédric Doucet, a réclamé sur Twitter que M. Miller démissionne de son poste de ministre advenant que le projet de loi soit adopté.
La députée de Saint-Laurent, Emmanuella Lambropoulos, qui a notamment mis en doute le déclin du français au Québec et propagé des informations trompeuses sur la Charte de la langue française, a été on ne peut plus claire quant à ses intentions dans une entrevue sur les ondes de la radio montréalaise CJAD.
«Dans son état actuel, je ne vais pas voter en faveur», a-t-elle affirmé au sujet de C-13, ajoutant qu'«il y a plusieurs autres» députés qui entendent faire de même.
Mardi soir, le député de Mont-Royal, Anthony Housefather, a indiqué qu'il y a une «ligne rouge» qu'il ne franchira pas, soit d'appuyer un projet de loi qui donne «un effet substantiel» à la Charte de la langue française du Québec.
«Si ces amendements restent dans le projet de loi C-13, c'est sûr que je ne peux pas appuyer C-13, mais j'attends parce qu'il y a des options pour amender C-13», a-t-il dit.
Ces commentaires s'ajoutent à ceux publiés en pleine nuit sur le web par le député de Notre-Dame-de-Grâce_Westmount, Marc Garneau, qui s'est défendu de vouloir affaiblir la réforme.
Il y plaide être opposé à ce qu'une loi fédérale, dans ce cas-ci la Loi sur les langues officielles, réfère à une loi provinciale, ici la Charte de la langue française. Cela risque, selon lui, d'entraîner des «chicanes constitutionnelles sur l'interprétation de C-13».
M. Garneau, qui a reproché aux médias dans sa lettre ouverte de ne pas le citer lorsqu'il «affirme constamment que le français est la langue officielle du Québec», a refusé tant mardi que mercredi de s'arrêter pour répondre aux questions.
Dans une déclaration écrite transmise à La Presse Canadienne, une porte-parole de la ministre des Langues officielles Ginette Petitpas Taylor a rappelé à l'ordre les élus libéraux.
«Comme l'a dit le premier ministre la semaine dernière, notre priorité est de voir le projet de loi C-13 adopté dans les plus brefs délais, insiste-t-elle. On s'attend à ce que tous les parlementaires se rallient derrière ce projet de loi porteur et ambitieux.»
Lorsque questionné mercredi matin à savoir si l'ensemble du caucus québécois votera de la même façon sur C-13, le lieutenant libéral pour le Québec, Pablo Rodriguez, a offert un «j'espère».
«C'est normal qu'il y ait des discussions, mais le projet définitivement qu'il va passer, a assuré M. Rodriguez. C'est un très bon projet de loi. C'est un très, très bon projet de loi.»
Le député franco-ontarien Francis Drouin, qui siège au comité des langues officielles et qui avait dénoncé la semaine dernière le «show de boucane (...) honteux» de ses collègues de la «Montréal island», s'est également dit assuré que le projet de loi sera adopté.
«Le premier ministre, la ministre des Langues officielles - la ministre responsable du projet de loi - ont tous dit que le projet de loi doit aller de l'avant, ce qui veut dire que les députés doivent voter en faveur», a-t-il dit en arrivant au Parlement en après-midi.
Or, il n'est toujours pas clair si les libéraux imposeront une ligne de parti sur ce vote. «Le processus législatif suit son cours. Il n'y a aucune décision de prise», s'est borné à répéter le whip en chef du gouvernement, Steve MacKinnon.
Les libéraux permettent un vote libre dans trois circonstances: lorsqu'il s'agit d'engagements de la plateforme électorale, lorsque cela touche à la Charte des droits et libertés et lorsque c'est un vote de confiance.
Lors d'un point de presse avant la période des questions, le chef du Nouveau Parti démocratique, Jagmeet Singh, a révélé en réponse à un journaliste que «oui», tous les députés de son parti voteront en faveur du projet de loi C-13.
«On appuie le projet de loi, a-t-il déclaré. Les libéraux ont écrit le projet de loi. C'est leur propre loi qu'ils ont proposée. S'ils ont des problèmes, ils doivent les régler.»
Au Bloc québécois aussi on commence à dévoiler son jeu, et le chef Yves-François Blanchet a ouvert la porte plus grande que jamais mercredi à un appui au projet de loi, tout en disant qu'«il serait imprudent, compte tenu de l'effervescence actuelle» de trancher la façon dont ses troupes voteront.
Cela «deviendrait très tentant» de voter en faveur de la pièce législative advenant qu'elle applique la Charte de la langue française aux entreprises privées de compétence fédérale, ce qui est probablement la plus importante demande du gouvernement du Québec. Dans de telles circonstances, a-t-il ajouté, «je ne vois pas comment on pourrait voter contre».
Les bloquistes se sont engagés à déposer un tel amendement. Les conservateurs et néo-démocrates ont indiqué être en faveur. Cela devrait permettre à l'amendement de passer malgré que les libéraux soient contre.
Au Bloc québécois, on s'amuse à observer depuis les gradins «une chicane interne majeure» au sein du Parti libéral, a indiqué M. Blanchet, dans le foyer des Communes. Il a noté que non seulement «ce n'est pas tous les jours» qu'un député du gouvernement annonce qu'il pourrait voter contre un projet de loi de son parti, mais que dans le cas d'un ministre, «c'est historique».
Quoi qu'il en soit, M. Blanchet estime qu'il ne serait pas surprenant que soudainement, ça devienne «bien long, bien, bien, bien long» d'étudier le projet de loi et que les libéraux «parlent longtemps, longtemps» de sorte que le projet de loi traîne abusivement et ne soit jamais mis aux voix avant la fin de la législature.