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À l'heure où de nombreux cinémas indépendants au Canada sont en difficulté, un cinéma montréalais «d'art et essai» affirme entrer dans un nouveau chapitre après avoir reçu un don important du réalisateur québécois Denis Villeneuve.
À l'heure où de nombreux cinémas indépendants au Canada sont en difficulté, un cinéma montréalais «d'art et essai» affirme entrer dans un nouveau chapitre après avoir reçu un don important du réalisateur québécois Denis Villeneuve.
Le Cinéma du Parc a annoncé cette semaine que le réalisateur à l'origine de «Dune» et de «Blade Runner 2» est le plus récent cinéaste de renom à apporter son soutien à un cinéma indépendant apprécié des cinéphiles. Villeneuve a fait don d'un montant non dévoilé pour aider à assurer la sécurité financière à long terme de ce cinéma d'art et d'essai qu'il fréquente depuis longtemps.
Le cinéma indépendant a dépensé récemment plus de 1,4 million $ pour se refaire une beauté. Situé au sous-sol d'un petit centre commercial sur l'avenue du Parc près de l'Université McGill, le cinéma arbore maintenant des rideaux rouges évoquant l'univers de «Twin Peaks» de David Lynch. Même les cabines de toilettes ont été rénovées avec des portraits de personnages du film culte.
Dans une entrevue avec La Presse Canadienne, Roxanne Sayegh, directrice générale du cinéma, souligne que la fréquentation demeure bonne et que le cinéma est financièrement solide, mais que l’argent de Denis Villeneuve contribuera à assurer la «stabilité» dont l'organisme a tant besoin dans les années à venir.
Denis Villeneuve «savait que ce serait un investissement majeur pour le cinéma et il croyait en notre mission», dit-elle.
«C’est un cinéma qui a aussi été très important dans sa carrière de cinéaste, rappelle-t-elle. Il vient au Cinéma du Parc depuis des décennies, alors quand je l’ai contacté, il a accepté de nous soutenir.»
En entrevue, le réalisateur québécois confirme l'importance dans son parcours de ce cinéma d'art et essai qu'il a découvert quand il était étudiant, par l'entremise du Festival du nouveau cinéma, et qu'il a continué à fréquenter au fil des ans.
«J'ai découvert plein d'auteurs importants pour moi, comme John Cassavetes, [Andreï] Tarkovski, David Lynch, raconte le réalisateur. C'est un cinéma qui me donnait accès à des versions originales des films, à des projections de qualité, et il y a toute une richesse incroyable cinématographique.
«Et c'est un public jeune, en général — c'est dans un quartier d'étudiants. Il y a beaucoup d'étudiants qui vont là et c'est ça que je trouve magnifique (...) de conserver cette idée de cette habitude de la salle obscure: c'est dans cet esprit là que j'ai décidé d'aider.»
Ce n’est pas la première fois que Villeneuve donne de l’argent à l’organisme à but non lucratif qui gère le Cinéma du Parc, mais aussi le cinéma de quartier Beaubien et le Cinéma du Musée. L’année dernière, le réalisateur avait aussi aidé financièrement le Beaubien, dans Rosemont.
Roxanne Sayegh affirme qu’un tel soutien est essentiel à un moment où tant de cinémas sont en difficulté.
En mars dernier, le Réseau des exploitants canadiens indépendants a publié les résultats d'un sondage mené auprès de quelque 70 exploitants de salles indépendants au Canada entre décembre 2023 et février 2024. Le sondage a révélé que l’industrie était en état de «crise», 60 % des répondants déclarant fonctionner à perte à la fin de leur plus récent exercice financier.
Le Conseil des arts de Montréal a participé à la coordination du don de Villeneuve. «Ce que nous espérons vraiment, c’est qu’un don comme celui de Denis Villeneuve inspirera d’autres personnes», a déclaré Julien Valmary, directeur de la philanthropie et du soutien au Conseil des arts.
Villeneuve n’est pas le seul réalisateur à avoir soutenu des cinémas indépendants depuis quelques mois. En juillet dernier, le réalisateur mexicain Guillermo del Toro a partagé une pétition sur X pour sauver le cinéma «Revue» de Toronto. En juin, des dons de réalisateurs de renom comme Quentin Tarantino, David Lynch et Martin Scorsese ont sauvé le cinéma d'art et essai «La Clef» à Paris, selon les médias.
Sonya William, directrice du Réseau des exploitants canadiens indépendants, espère également que d’autres cinéastes suivront les traces de Villeneuve. Mais elle admet que les problèmes auxquels sont confrontés les cinémas et les cinéparcs sont plus importants que le simple financement.
«La façon dont fonctionne la distribution des films au Canada (...) est vraiment très difficile, et cela conduit en quelque sorte les cinémas indépendants vers l’échec.» Elle cite par exemple les pratiques imposées par les grands studios américains comme de sérieux obstacles à la viabilité des petites salles.
Une de ces pratiques oblige les cinémas qui veulent présenter un certain film à le projeter plusieurs fois par jour pendant un nombre déterminé de semaines, même si ce n’est pas rentable, a rappelé le directeur de la programmation du Cinéma du Parc, Jean-François Lamarche.
Une autre pratique est le «zonage», une règle non écrite en vertu de laquelle les studios donnent la préférence aux grandes salles commerciales dans une zone géographique désignée, ce qui signifie que les petits cinémas indépendants doivent attendre que les grandes salles arrêtent de projeter un film avant de pouvoir le présenter, explique M. Lamarche.