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Depuis 2020, environ 800 des 22 000 médecins du Québec ont choisi d'aller pratiquer au privé, a souligné le ministre Dubé en mêlée de presse.
Les fédérations de médecins ont tiré à boulets rouges, jeudi, sur le projet de loi 83 de Christian Dubé qui forcerait les nouveaux médecins à passer les cinq premières années de leur pratique dans le réseau public.
Depuis cinq ans, près de 800 médecins ont quitté le système public pour aller pratiquer au privé, et pas moins de 2300 médecins formés au Québec sont déménagés en Ontario, a signalé le ministre de la Santé au jour 1 des consultations particulières.
Toutefois, obliger les nouveaux médecins à œuvrer au Québec, au public, pendant cinq ans, sous peine d'amende, est une «fausse bonne idée» qui ne traite pas les «causes» du problème, a plaidé jeudi la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ).
Son président, le Dr Marc-André Amyot, a exigé le retrait de la pièce législative, en comparant le ministre à un médecin qui «donne des médicaments pour la fièvre et pour la toux, mais qui ne traite pas la pneumonie».
«Qu'est-ce qui va arriver? La pneumonie va empirer», a-t-il dit. Le président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ), le Dr Vincent Oliva, a renchéri avec une autre image.
«La stratégie du PL83, c'est celle d'un coach dont l'équipe tire de l'arrière 7-1, qui demande à ses joueurs de lâcher les gants. Les spectateurs sont contents, mais il va perdre le match. C'est une diversion.»
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Au lieu de «taper sur la tête» des médecins, essayez de comprendre pourquoi ils quittent le système public, a-t-il poursuivi, suggérant que le «manque d'organisation» et la «pénurie critique de ressources» dans le réseau étaient à blâmer.
Par exemple, les orthopédistes n'ont accès à une salle d'opération en moyenne qu'un jour par semaine. Ils se désaffilient pour aller opérer au privé, puis reviennent au public, a expliqué la présidente de l'Association d'orthopédie du Québec, la Dre Véronique Godbout.
«Réglez votre système public», a lancé le Dr Oliva. Selon lui, à l'heure actuelle, le privé sert de «soupape», parce que «le réseau public ne fonctionne pas, (...) il déborde».
«Ce que je comprends, c'est que même si on oblige les nouveaux médecins à travailler dans le public, certains d'entre eux vont se tourner les pouces, parce qu'on n'a pas les plateaux ou le personnel pour les soutenir?» a demandé la députée libérale Linda Caron.
«Pour plusieurs d'entre eux, absolument», a répondu le président de la FMSQ.
M. Dubé qui s'étonne que les médecins aillent au privé, «c'est comme si le ministre des Finances s'étonnait de voir de plus en plus de contribuables éviter l'impôt après avoir lui-même créé des échappatoires», a commenté le député Vincent Marissal, de Québec solidaire.
La Fédération médicale étudiante du Québec (FMEQ) a fait savoir, jeudi, que 57 % des quelque 1420 membres qui ont participé à son sondage sont prêts à quitter le Québec advenant l'adoption du projet de loi 83, jugé «coercitif» et «discriminatoire».
Elle a notamment plaidé pour le droit des étudiants en médecine de changer de programme, de se réorienter ou d'abandonner la profession sans s'exposer à des pénalités pour bris d'engagement.
«Ce qui se fait de mieux à l'international, c'est de donner envie au monde d'aller dans le réseau. Ce n'est pas de les attacher au réseau. Il faut que le réseau public redevienne un employeur de choix», a soutenu Maxence Pelletier-Lebrun, de la FMEQ.
«S'il y a un message à retenir, c'est: "Faites en sorte que les étudiants en médecine aient envie d'aller dans le réseau public"», a-t-il ajouté.
À son tour, la Fédération des médecins résidents du Québec (FMRQ) s'est présentée en commission parlementaire pour dénoncer un projet de loi écrit «à la va-vite, sur le coin d'une table, sans réelle considération des ramifications très importantes qui pourraient suivre».
«On demande le retrait total du projet de loi», a déclaré son président, Ghassen Soufi.
En fin de journée, le cabinet de Christian Dubé a transmis aux médias les résultats d'un sondage interne réalisé par la firme Synopsis, qui suggère que 86 % des Québécois sont d'accord avec le principe d'obliger les médecins à pratiquer dans le réseau public québécois pendant cinq ans.
Le coup de sonde a été effectué en ligne auprès de 1000 Québécois, les 17-18 décembre dernier.