«J’ai beaucoup d’instabilité dans les mains, une faiblesse: je ne peux pas aller chercher des choses de plus de 2 ou 3 lb, j’ai de la misère à m’habiller, à tourner ma clé, à soutenir mon énergie, faire la bouffe, le ménage – toutes les choses que les gens ont à faire au quotidien...»
Josée St-Onge souffre d'une qualité de vie amoindrie en raison d'une maladie héréditaire rare: un syndrome d'Ehlers-Danlos, une hypermobilité articulaire. Avoir un chien d'assistance lui permettrait de regagner de l'autonomie, mais comme beaucoup d'autres Québécois, c'est un rêve inaccessible. Il n'y a tout simplement pas suffisamment de compagnons canins pour répondre à la demande.
La mère montréalaise de trois enfants doit se tourner vers une solution privée et donc onéreuse, à plusieurs dizaines de milliers de dollars.
«Le syndrome touche tous les systèmes de notre corps; le système nerveux et digestif, notre peau, et tout ça. Ce n’est pas juste de l’instabilité ou de la douleur dans les articulations», a explique Mme St-Onge à Noovo Info. Ses tâches du quotidien sont parfois très pénibles à accomplir.
Infirmière depuis 23 ans, Josée St-Onge a dû quitter les soins directs aux patients pour miser sur le télétravail où elle fait des consultations à distance. «J’ai un petit chagrin au cœur parce que j’aimais vraiment ça donner des soins aux patients», a-t-elle affirmé.
Les syndromes d’Ehlers-Danlos sont des maladies héréditaires rares du tissu conjonctif qui aboutissent à une souplesse anormale des articulations, une peau très élastique et des tissus fragilisés. Ces syndromes sont provoqués par une anomalie de l’un des divers gènes qui contrôlent la production de tissu conjonctif.- Les symptômes typiques comprennent des articulations souples, une bosse, les pieds plats et la peau élastique- Le diagnostic repose sur les symptômes et sur les résultats de l’examen clinique- La plupart des personnes atteintes de ce syndrome ont une espérance de vie normale.- Les syndromes d’Ehlers-Danlos sont incurables.Source: Le manuel Merck
La course au chien d’assistance
Josée St-Onge est convaincue qu’un chien d’assistance deviendrait «ses mains», en quelque sorte, et améliorerait son sort.
«Je crois qu’un chien d’assistance va vraiment venir rajouter une qualité de vie que je n’ai pas en ce moment.»
Un chien d’assistance bien formé aiderait Mme St-Onge dans différentes situations du quotidien.
«Le chien que j’ai en tête, il est formé pour m’aider à retirer mes vêtements, aller chercher des petits objets par terre, trouver mon téléphone, me donner de l’eau, ouvrir mon frigo, etc. Il est aussi entraîné pour faire de la pression si jamais j’ai de la difficulté, comme des étourdissements», a expliqué Mme St-Onge.
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Un chien d’assistance serait aussi grandement utile dans les déplacements de Josée St-Onge alors que l’animal pourrait la soutenir, diminuant ainsi son anxiété et les risques de blessures.
«Le chien pourrait m’aider pour aller faire l’épicerie, pour être au public, parce que je développe beaucoup d’angoisse parce qu’à tout moment si quelqu’un me fonce dedans, ma hanche peut débarquer ou je peux avoir une blessure qui me demande des mois de réadaptation», raconte-t-elle.
Josée St-Onge a bien tenté de cogner aux portes d’organismes québécois dédiés aux chiens d’assistance afin d’obtenir un animal, en vain.
C’est finalement auprès d’un organisme de l’Alberta, le Summit Assistance Dogs Center de Medicine Hat, que Mme St-Onge croit avoir trouvé la perle rare.... au coût de 35 000 $.

Grâce à une collecte de fonds sur GoFundMe, Josée St-Onge a récolté à ce jour quelque 18 000 $, soit environ la moitié de la somme nécessaire.
Il reste toutefois peu de temps pour que Mme St-Onge puisse accéder à son rêve.
Mme St-Onge doit réunir cette somme d’ici la fin du mois d’août sans quoi l’animal sera attribué à une autre personne et elle devra retourner sur la liste d’attente.
Mira peine à répondre à la demande
Au Québec, la Fondation Mira est probablement l’organisme le plus connu lorsqu’il est question de chien d’assistance.
Mira éduque et offre gratuitement – grâce aux dons du public, sans aide gouvernemental – des chiens d’assistance, entre autres, pour les personnes non voyantes et malvoyantes, pour les jeunes présentant un trouble du spectre de l’autisme (TSA) et pour une aide à la mobilité.

Aurélie Tremblay, directrice des programmes à la Fondation Mira, a expliqué à Noovo Info que le programme de chien d’assistance à la mobilité vient en aide notamment aux gens qui ont besoin de soutien à la marche et aux gens en fauteuil roulant manuel ou motorisés.
«Selon la fonction dont la personne a besoin, le chien aura un entraînement spécifique», a-t-elle ajouté précisant que tous les chiens de la Fondation Mira ont des fonctions de rapports d’objets.
«Ils peuvent aider la personne pour le déshabillage (tirer sur un vêtement, enlever les chaussettes), l’ouverture de porte, appuyer sur des boutons…etc. C’est assez large», a-t-elle dit.
L’organisme affirme être en mesure de jumeler une centaine de chiens par année.
La demande pour des chiens d’assistance est toutefois bien plus forte.
«La réalité est que nous avons dû fermer notre liste d’attente en 2022 parce qu’on avait trop demande et nous étions dans des délais raisonnables pour recevoir des demandes et les traiter», a mentionné Aurélie Tremblay.
Mme Tremblay a précisé que l’aspect spécifique et personnalisé du programme de chien d’assistance à la mobilité de la Fondation Mira fait aussi en sorte que l’organisme est limité dans sa capacité à donner des chiens en quantité.

Le volet «renouvellement» entre aussi en jeu. «Une personne qui a eu la chance de profiter d’un chien d’assistance dans sa vie, si malheureusement le chien prend sa retraite ou décède, ces gens-là deviennent prioritaires pour obtenir un chien parce qu’on veut éviter les bris de services», a expliqué Mme Tremblay.
La Fondation Mira a bon espoir de rouvrir sa liste d’attente dans les prochaines années.
«Il me reste un sixième de ma liste d’attente de 2022», a souligné Aurélie Tremblay.
Le parcours d’un chien Mira
La Fondation Mira possède son propre cheptel de chiens et sa propre pouponnière à Sainte-Madeleine.
Les chiots demeurent avec leur mère jusqu’à l’âge de neuf semaines puis ils sont placés dans des familles d’accueil pour une période de 12 à 18 mois.
Mira prend en charge les soins vétérinaires et l’alimentation des chiens alors que les familles d’accueil ont le devoir de s’assurer qu’ils reçoivent de bons soins et de l’amour et qu’ils développent de bons comportements tout en sociabilisant.
Après la période en famille d’accueil, les chiens Mira retournent au sein de l’organisation pour être évalués par un instructeur pour déterminer le programme auquel ils seront attribués (pour les non-voyants ou malvoyants, pour le programme d’assistance à la mobilité ou pour travailler auprès des jeunes TSA).
Si la plupart deviennent des chiens d’assistance, certains d’entre eux n’ont pas les qualifications requises et seront mis à l’adoption – moyennant un don –, soit auprès de leur famille d’accueil, soit auprès de familles du grand public.
La Fondation Mira est accréditée par l’Assistance Dogs International et l’International Guide Dog Federation – deux organisations reconnues par le gouvernement du Québec lorsqu’il est question d’aide financière pour les chiens d’assistance.
Le droit d’accès aux chiens d’assistance
Il faut savoir que la Charte des droits et libertés de la personne stipule «qu’on ne peut discriminer une personne en raison de son handicap ou du moyen qu’elle choisit pour le pallier» et que le chien d’assistance et le chien guide sont reconnus comme un moyen de pallier un handicap par les tribunaux québécois.
Le tout veut donc dire que les personnes accompagnées d’un chien d’assistance ont le droit d’accéder aux lieux publics (commerces, restaurants, hôtels, etc.) et aux moyens de transport (autobus, taxis, etc.).
«Leur présence ne peut pas être refusée, peu importe la politique habituelle», peut-on lire sur une page du site Web du gouvernement du Québec dédié à des informations liées aux chiens d’assistance.
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Il est possible de reconnaître un chien d’assistance notamment par un élément d’identification visuelle affichant le logo de l’organisme qui l’a entraîné. Il peut s’agir, par exemple, d’un harnais, d’un dossard ou d’un foulard.
