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Ben Ferencz venait d’avoir 103 ans en mars.
Ben Ferencz, le dernier procureur vivant des procès de Nuremberg, qui a jugé des nazis pour crimes de guerre et des crimes contre l'humanité et a été parmi les premiers témoins extérieurs à documenter les atrocités des camps de concentration et d'extermination nazis, est décédé. Il venait d’avoir 103 ans en mars.
M. Ferencz s'est éteint vendredi soir à Boynton Beach, en Floride, selon John Barrett, professeur de droit à l’Université St. John’s, qui tient un blogue sur les procès de Nuremberg. La mort a également été confirmée par le U.S. Holocaust Museum à Washington.
«Aujourd’hui, le monde a perdu un leader dans la quête de justice pour les victimes du génocide et des crimes connexes», a écrit sur Twitter le musée.
Né en Transylvanie en 1920, M. Ferencz a immigré très jeune avec ses parents à New York pour échapper à l’antisémitisme endémique. Après avoir obtenu son diplôme de la Faculté de droit de Harvard, M. Ferencz a rejoint l’armée américaine juste avant de participer à l’invasion de la Normandie pendant la Seconde Guerre mondiale. Utilisant sa formation juridique, il est devenu enquêteur sur les crimes de guerre nazis contre des soldats américains dans le cadre d’une nouvelle section des crimes de guerre du bureau du juge-avocat.
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Lorsque les rapports des services de renseignement américains ont décrit des soldats rencontrant de grands groupes de personnes affamées dans des camps nazis surveillés par les SS, M. Ferencz a poursuivi avec des visites, d’abord au camp de travail d’Ohrdruf en Allemagne, puis au tristement célèbre camp de concentration de Buchenwald. Dans ces camps et plus tard dans d’autres, il a trouvé des corps «empilés comme du bois de chauffage» et «des squelettes impuissants souffrant de diarrhée, de dysenterie, de typhus, de tuberculose, de pneumonie et d’autres affections, vomissant dans leurs couchettes infestées de poux ou sur le sol avec seulement leurs yeux pathétiques implorant de l’aide», a écrit Ferencz dans ses mémoires.
«Le camp de concentration de Buchenwald était un charnier d’horreurs indescriptibles, a écrit M. Ferencz. Il ne fait aucun doute que j’ai été profondément traumatisé par mes expériences en tant qu’enquêteur sur les crimes de guerre dans les centres d’extermination nazis. J’essaie toujours de ne pas parler ou de ne pas penser aux détails.»
Vers la fin de la guerre, M. Ferencz a été envoyé à la résidence de montagne d’Adolf Hitler dans les Alpes bavaroises pour rechercher des documents incriminants, mais est revenu les mains vides.
Après la guerre, M. Ferencz a été honorablement renvoyé à la vie civile et est retourné à New York pour commencer à pratiquer le droit. Mais ce fut de courte durée. En raison de ses expériences en tant qu’enquêteur sur les crimes de guerre, il a été recruté pour aider à poursuivre les criminels de guerre nazis lors des procès de Nuremberg, qui avaient commencé sous la présidence du juge britannique Geoffrey Lawrence. Avant de partir pour l’Allemagne, il a épousé sa petite amie d’enfance, Gertrude.
À l’âge de 27 ans, sans aucune expérience de procès, M. Ferencz est devenu procureur en chef pour une affaire de 1947 dans laquelle 22 anciens commandants de camp ont été accusés du meurtre de plus d’un million de Juifs, de Roms et d’autres ennemis du Troisième Reich en Europe de l’Est. Plutôt que d’utiliser des témoins, M. Ferencz s’est principalement appuyé sur des documents officiels allemands pour plaider sa cause. Tous les accusés ont été reconnus coupables et plus d’une douzaine ont été condamnés à mort par pendaison même si M. Ferencz n’avait pas demandé la peine de mort.
«Début avril 1948, à la lecture du long jugement judiciaire, je me suis senti justifié, a-t-il écrit. Nos appels à protéger l’humanité par l’État de droit ont été confirmés.»
Avec la fin des procès pour crimes de guerre, M. Ferencz est allé travailler pour un consortium de groupes caritatifs juifs pour aider les survivants de la Shoah à récupérer des propriétés, des maisons, des entreprises, des œuvres d’art, des Torahs et d’autres objets religieux juifs qui leur avaient été confisqués par les nazis. Il a également participé plus tard aux négociations qui conduiraient à une indemnisation des victimes.
Au cours des décennies suivantes, M. Ferencz s’est fait le champion de la création d’un tribunal international qui pourrait poursuivre les dirigeants de n’importe quel gouvernement pour crimes de guerre. Ces rêves se sont réalisés en 2002 avec la création de la Cour pénale internationale à La Haye, bien que son efficacité ait été limitée, car certains pays comme les États-Unis n’y participent pas.
M. Ferencz laisse dans le deuil un fils et trois filles. Sa femme est décédée en 2019.