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Parce que ce ne sont pas mes 5 pieds 1 pouce qui feraient peur à qui que ce soit.
En m’habillant pour aller courir cet été à Montréal, j’hésitais à quitter seulement habillée d’un short et d’une brassière de sport. J’ai finalement opté pour un chandail plus ample pour éviter les commentaires et les regards insistants. Même si je peux probablement courir plutôt rapidement en cas de problème, ce ne sont pas mes 5 pieds 1 pouce qui feraient peur à qui que ce soit.
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Les crimes contre la personne sont en augmentation dans la métropole, selon le dernier rapport annuel d’activités du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM). En 2023, le service de police a répertorié pas moins de 31 009 homicides, tentatives de meurtre, voies de fait ou agressions sexuelles.
Je ne suis visiblement pas la seule femme à avoir eu ce sentiment en déambulant à travers la métropole. Plus tôt cet été, l’avocate Megan Lynch avait raconté s’être sentie «vraiment en danger» alors qu’elle s’était fait arrêter en Bixi à Montréal.
Je me suis demandé dans quelle mesure je pouvais prendre ma propre sécurité en main. Premier arrêt: une école d’autodéfense.
Par une chaude journée d’été, j’ai pris le chemin de l’école de George Manoli, un ancien policier qui donne des cours d’autodéfense. Ce dernier procède à des simulations d’agression afin que ses élèves soient prêts à réagir. Il m’a d’ailleurs conseillé de ne pas mettre mes habits de gala comme je serais son cobaye.
À en croire M. Manoli, je ne suis d’ailleurs pas la seule à avoir pensé à cette option. Ce dernier donne des cours six jours par semaine en raison de l’«énorme» demande.
«J’ai des agents immobiliers, j'ai des top-modèles, j’ai des clientes de l’indemnisation des victimes d’actes criminels (IVAC) et j'ai de jeunes filles qui commencent à sortir», énumère-t-il.
Certains parents lui ont même amené leurs enfants en lui expliquant qu’ils espéraient qu’ils soient différents en quittant son école. Selon lui, certains jeunes vivent dans un «monde de Walt Disney» et croient qu’il ne leur arrivera jamais rien.
«Les parents les amènent ici pour qu’on leur explique c'est quoi la réalité dans la rue et aussi la façon qu’on aborde ici, je ne suis pas gentil, je ne suis pas délicat», confie-t-il.
Une agression ne se déroule d’ailleurs pas comme dans un film à la Jackie Chan. Pour me montrer que ce n’est pas si simple, M. Manoli me demande de bloquer ses coups alors qu’il tente de simuler une attaque au couteau en brandissant une bouteille d’eau. Résultat: je n’ai bloqué aucun coup.
L’objectif des cours de M. Manoli est justement de permettre aux élèves d’être en mesure de réagir à une potentielle agression.
Pour lui, ce n’est d’ailleurs pas en pratiquant des katas que l’on connaît nos réactions face à une attaque. Affublé d’un énorme casque et d’un équipement ressemblant à celui d’un joueur de hockey, M. Manoli m’apprend les rudiments de l’autodéfense.
La dernière simulation se fait les yeux bandés. Je dois me défendre sans savoir par quel côté il prévoit attaquer. Si mes techniques d’autodéfense ne sont pas encore au point, je réalise avec seulement ce petit exercice à quel point je serais déstabilisée dans une ruelle.
Il peut être tentant de se munir d’une bouteille de poivre de Cayenne pour se sentir encore plus protégé. Mais est-ce une option qui est légale? C’est la question que j’ai posée à l’avocate en droit criminel et pénal Arij Riahi.
«L'objet en soi, le poivre de Cayenne, n'est pas nécessairement légal au Canada, mais tout dépend de l'utilisation qu'on en fait», explique-t-elle d’emblée dans son bureau de Laval.
Plusieurs objets qui sont vendus dans les magasins à grande surface ne sont pas nécessairement légaux. On peut penser notamment aux répulsifs à chiens ou à ours qui sont facilement accessibles dans les endroits spécialisés en plein air.
«Tout dépendamment du contexte, comment c'est utilisé. Et c'est ça la grande différence en droit criminel entre un objet et une arme», note Me Riahi.
Une différence est faite entre un répulsif canin gardé dans un sac ou le même objet utilisé dans le visage de quelqu’un. «Je peux faire face à des accusations. À ce moment-là, c'est un juge qui va trancher. Est-ce que l'utilisation que j'ai faite du répulsif canin, c'était dans le cadre d'une légitime défense, oui ou non?», poursuit-elle.
Le droit criminel canadien permet la légitime défense. Plusieurs éléments seront analysés durant un procès de ce type, notamment si une attaque a réellement eu lieu.
«Est-ce que mon geste en utilisant le poivre de Cayenne ou le répulsif canin était vraiment défensif ? Est-ce que c'était proportionnel à l'attaque que j'ai reçu ? Ce sont parmi les facteurs qui vont être évalués par un juge dans le cadre d'un procès pour décider si cette utilisation-là était vraiment dans un but défensif», souligne Me Riahi.
Cette dernière rappelle que les tribunaux prennent au sérieux l’utilisation des armes. Commettre un crime avec une arme peut souvent mener à une peine de prison.
Note de la rédaction: la version initiale de cet article mentionnait que 31 0000 crimes contre la personne avaient eu lieu en 2023 selon le dernier rapport annuel d’activités du Service de police de la Ville de Montréal. Il s'agit plutôt de 31 009 crimes contre la personne qui ont eu lieu en 2023. Pour plus d’information, consultez les normes éditoriales de Noovo Info.