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Après Québec, c'est au tour d'Ottawa de dire au non à Énergie Saguenay, ce mégaprojet d'usine de liquéfaction de gaz naturel destiné à l'exportation.
Après Québec, c’est au tour d’Ottawa de dire au non à Énergie Saguenay, ce mégaprojet d’usine de liquéfaction de gaz naturel destiné à l’exportation.
Ce refus enterre pour de bon ce chantier controversé estimé à plus de 10 milliards $ dans sa forme actuelle, mais l’entreprise pourrait aussi présenter une toute nouvelle proposition.
Dans son rapport de 285 pages rendu public lundi, après six ans d’examen, l’Agence d’évaluation d’impact du Canada a fait savoir que le projet était susceptible de nuire à l’environnement.
L’Agence conclut que l’usine augmenterait les émissions de gaz à effet de serre (GES), que la hausse du trafic maritime sur le Saguenay nuirait à la population de bélugas, tandis qu’il y aurait également des effets négatifs sur le patrimoine culturel des Premières Nations innues.
Le gouvernement Trudeau a donc décidé que ces impacts négatifs sur l’environnement étaient non justifiables dans les circonstances et a refusé d’accorder son autorisation.
L'Agence évalue notamment que l'apport des émissions de GES de l'usine rendra encore plus difficile l'atteinte des objectifs de réduction des GES du Canada et du Québec.
Elle juge aussi qu'il y aurait des «effets importants directs et cumulatifs sur les mammifères marins, incluant le béluga compte tenu, notamment, des effets du bruit subaquatique sur le béluga du Saint-Laurent, allant à l'encontre des objectifs des programmes de rétablissement des mammifères marins en péril de l'estuaire du Saint-Laurent».
Le projet prévoit en effet 140 à 165 chargements de navires par année qui redescendront ensuite le Saguenay pour rejoindre le Saint-Laurent.
Enfin, l'organisme fédéral estime que les effets seront «modérés» sur l'usage courant des terres et des ressources par les Premières Nations innues, mais que les effets seront «importants» sur le patrimoine culturel des Premières Nations innues, «compte tenu du dérangement des mammifères marins qui serait occasionné par l'augmentation du trafic maritime».
Plusieurs groupes écologistes qui ont mené bataille contre ce projet ont crié victoire lundi, notamment Greenpeace.
«La décision du gouvernement Trudeau est le clou final dans le cercueil de ce projet», a déclaré le responsable de la campagne climat-énergie de Greenpeace, Patrick Bonin.
«Les gouvernements doivent maintenant appliquer la même logique à tous les autres projets d'expansion de la production de pétrole et de gaz au Québec et au Canada et les rejeter.»
Le projet Énergie Saguenay de GNL Québec consiste en une usine de liquéfaction de gaz naturel à Saguenay assortie d'un long gazoduc pour l'approvisionner. Mais il avait déjà peu de chances de voir le jour depuis que le gouvernement Legault l'avait refusé.
Rappelons que l'an dernier, le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE) avait émis un rapport dévastateur sur le projet, ce qui avait amené le gouvernement Legault, pourtant assez favorable, à refuser d'accorder les autorisations nécessaires.
La somme des risques du projet dépassait largement ses avantages, concluait le BAPE.
Le promoteur soutient que le bilan carbone sera positif parce que son énergie servira de substitut à des énergies plus polluantes à l'étranger. Cependant, le BAPE affirme plutôt que les émissions de GES associées à l'approvisionnement en gaz naturel en amont ne permettent pas de confirmer ce bilan positif.
En outre, ces nouvelles infrastructures d'approvisionnement en GNL risquent de retarder la transition vers des énergies plus propres dans le monde, sur les marchés d'exportation visés, concluait le BAPE.
Le BAPE soutient aussi que le gouvernement devra prendre en compte les risques que fait poser le trafic maritime sur la survie des bélugas qui fréquentent le Saguenay et l'estuaire du Saint-Laurent.
Le BAPE estime que le débat est fortement polarisé et que ses audiences n'ont pas permis de se prononcer sur l'acceptabilité sociale du projet.
En juillet, le cabinet Legault a finalement statué que le projet risquait de «défavoriser la transition énergétique».
Le ministre québécois de l'Environnement, Benoit Charette, estimait que l'évaluation fédérale encore en cours à l'époque était `contre-intuitive' parce que le Québec avait déjà dit non au projet.
L'Agence rappelle toutefois que le projet est assujetti à une évaluation fédérale parce qu'il comprend «la construction, l'exploitation, (...) d'une nouvelle installation de liquéfaction, de stockage ou de regazéification de gaz naturel liquéfié d'une capacité de traitement de gaz naturel liquéfié de 3000 tonnes par jour ou plus».
Et de surcroît, il comprend «la construction, l'exploitation, la désaffectation et la fermeture d'un nouveau terminal maritime conçu pour recevoir des navires de plus de 25 000 tonnes de port en lourd».
L'objectif de l'usine était d'exporter par voie maritime, chaque année, 11 millions de tonnes de gaz naturel provenant de l'Ouest canadien vers l'Europe et l'Asie, pour une période allant de 25 à 50 ans. Un gazoduc de 780 kilomètres de long devait aussi être construit par l'entreprise Gazoduq, afin d'acheminer le gaz de l'Ontario au Saguenay.