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Agrandissement du Port de Montréal: les travaux préparatoires sur le point de débuter

L'Administration portuaire de Montréal «dispose des autorisations requises pour ces travaux depuis mars 2021».

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71109b39da0b0b7da12eeb8a30d23e62b54136315786499d91cd065f5ef2cd2b.jpg Des conteneurs maritimes dans le port de Montréal sont photographiés à Montréal le jeudi 11 septembre 2025. LA PRESSE CANADIENNE/Christopher Katsarov (LA PRESSE CANADIENNE/Christopher Katsarov)

L’Administration portuaire de Montréal (APM) a confirmé mercredi son intention de lancer les travaux préparatoires cet automne pour son plan d'expansion à Contrecœur, un projet qui nécessite les autorisations de Pêches et Océans Canada car il serait construit dans l’habitat d’une espèce menacée. 

L'agrandissement du port est inclus dans la liste des projets identifiés par le Bureau des grands projets, liste présentée à Edmonton par le premier ministre Mark Carney il y a quelques semaines.

Les travaux préparatoires, qui doivent débuter dans les prochaines semaines, comprennent «l’installation de clôtures et de routes d’accès, la construction de plateformes de travail, une coupe sélective d’arbres ainsi que l’aménagement des bureaux».

Selon l'échéancier fourni lors d'une conférence de presse de l'APM mercredi matin, ces travaux s'échelonneront jusqu'en 2026.

«On a toutes les autorisations requises pour procéder à ce qu'on appelle les travaux préparatoires, à l’exception de l’installation d’une clôture de déviation qui requiert une autorisation en vertu de la Loi sur les espèces en péril», a indiqué Julien Beaudry, chef de cabinet et vice-président aux communications du Port de Montréal. 

L'installation de la clôture est une mesure qui vise à atténuer l'impact des travaux sur l'habitat de la rainette faux-grillon.

En attente d'une réponse de Pêches et Océans Canada

L’APM souhaite utiliser le site de Contrecœur pour augmenter sa capacité de manutention de conteneurs. On estime que jusqu’à 1,5 million de conteneurs par année pourraient transiter par ce futur terminal.

Deux postes à quai, une aire de manutention de conteneurs, une cour ferroviaire intermodale, un portail d’accueil pour les camions et des installations de soutien doivent notamment être construits.

Ces travaux d'expansion impliquent aussi de draguer le fond du fleuve Saint-Laurent dans l'aire de distribution du chevalier cuivré, une espèce menacée.

On ne retrouve le chevalier cuivré nulle part ailleurs sur la planète que dans un tronçon restreint du fleuve Saint-Laurent et quelques affluents, comme la rivière Richelieu, où il se reproduit.

En 2021, le ministre fédéral de l’Environnement et du Changement climatique de l'époque, Jonathan Wilkinson, avait donné son appui au projet d'agrandissement du port, en imposant toutefois une série de conditions et la mise en place d'un plan de compensation des impacts qui vise à créer de nouveaux habitats pour l'espèce en voie de disparition.

 

«On va planter des herbiers. Donc l'habitat du chevalier cuivré va être plus grand après la réalisation de ce projet qu'il est aujourd'hui. Et j'insiste, c'est un investissement important de plusieurs millions de dollars» et «notre intention, c'est de réaliser les plantations avant de procéder aux activités de dragage qui sont prévues. Autrement dit, on va construire avant d'intervenir» dans l'habitat du poisson, a indiqué Julien Beaudry.

Ce plan de compensation, qui repose notamment sur la plantation d’herbiers alimentaires pour le chevalier cuivré, proche de l’île aux Bœufs, doit obtenir l'approbation de Pêches et Océans Canada et l'APM croit que le ministère pourrait délivrer son autorisation dès le 28 novembre.

Un projet et un plan de compensation contestés

Ironiquement, ce projet de plantation d’herbiers dans le fleuve, qui a pour but d’aider à la survie de l’espèce en péril, pourrait, lui aussi, faire l’objet d’une évaluation environnementale, selon le biologiste Alain Branchaud.

«Ce projet là de compensation est d'une telle ampleur qu'il va nécessiter des travaux dans le fleuve Saint-Laurent qui sont d'une ampleur suffisante pour faire l'objet d'une évaluation environnementale en vertu de la Loi sur l'évaluation d'impact du Canada», a indiqué le biologiste qui est directeur général de la section québécoise de la Société pour la nature et les parcs du Canada (SNAP Québec).

«Ils ne sont pas sortis du bois dans cette aventure-là, ce qui me laisse croire moi qu'il y a une stratégie de tenter d’obtenir une autorisation» grâce à «la Loi visant à bâtir le Canada plutôt qu'à respecter les lois environnementales», a ajouté celui qui a plus d'une fois indiqué qu'il avait l’intention de poursuivre le gouvernement fédéral si l'agrandissement du port avait lieu dans l'habitat du chevalier cuivré.

Selon la Loi sur les espèces en péril, l’approbation de Pêches et Océans Canada est nécessaire pour procéder à des travaux dans l’habitat de ce poisson.

Toutefois, l’agrandissement du port de Montréal fait partie de la liste des projets d’infrastructure que le premier ministre Mark Carney souhaite voir approuvés et réalisés de façon accélérée. Le gouvernent pourrait donc approuver le projet sans tenir compte de la Loi sur les espèces en péril.

Un éventuel traitement accéléré qui ferait fi de certaines règles «est purement hypothétique», a réagi Julien Beaudry, chef de cabinet et vice-président aux communications du Port de Montréal.

«Notre plan A» est «d'attendre les autorisations», a-t-il précisé.

Selon l'échéancier présenté mercredi, le dragage du fleuve dans l'habitat du chevalier cuivré débutera à l'automne 2027 et l'agrandissement du port serait terminé en 2030.

L'APM doit également mettre en place des plans de compensation pour la perte de 18,5 hectares de milieux humides, la perte d'habitats pour différents poissons, pour l'hirondelle de rivage, pour des oiseaux aquatiques et pour une espèce de chauve-souris.

Les autorités du port ont indiqué, dans un document transmis aux médias mercredi, que quatre de ces sept plans de compensation sont déjà mis en œuvre.

Stéphane Blais

Stéphane Blais

Journaliste