Début du contenu principal.
Plus que jamais, le projet d’adopter un enfant à l’étranger est un processus long et complexe.
Plus que jamais, le projet d’adopter un enfant à l’étranger est un processus long et complexe. Au cours de la dernière année, le nombre d’enfants adoptés hors Québec a atteint un creux historique avec seulement 46 jumelages complétés en douze mois, selon un document récemment publié par le Secrétariat à l’Adoption internationale.
Moins de cinquante adoptions en 2021 comparativement à près de 1000 annuellement lors des années 90: que s’est-il passé?
En trente ans, les règles du jeu ont drastiquement changé en matière d’adoption internationale. Un nombre croissant de pays ont ratifié des conventions internationales pour protéger le droit et le bien-être des enfants.
À lire également:
La Convention de La Haye préconise, entre autres, le maintien du jeune dans sa famille biologique ou dans son pays d’origine.
Résultat: de moins en moins de tout-petits sont éligibles à l’adoption internationale, alors que le nombre de demandes en provenance du Québec est demeuré «plutôt stable» au cours des dernières années.
«Il y a malheureusement trop de parents intéressés pour le nombre d’enfants disponibles, ce qui crée encore plus d’attente qu’avant», résume la présidente de la Fédération des parents adoptants du Québec (FPAQ), Marielle Tardif.
La directrice générale du Secrétariat à l’adoption internationale (SAI) du Québec, Geneviève Poirier, dresse un portrait similaire de la situation.
Elle précise toutefois que la tendance observée au Québec n’est pas un cas unique, car l’adoption internationale est en recul un peu partout sur la planète.
«46, c’est peut-être un petit chiffre, mais ce sont quand même 46 enfants. […] Je pense que le vécu de ces jeunes et des familles adoptantes demeure important», souligne-t-elle d’emblée.
En 2021, parmi la cinquantaine d’enfants adoptés, 11 provenaient de la Colombie, 10 de la Thaïlande et 5 d’Haïti. Les deux tiers des enfants étaient des garçons, et près de la moitié de ces jeunes avaient des problèmes de santé.
Crédit photo: Noovo Info
À ce rythme, doit-on s’inquiéter de la disparition complète de l’adoption internationale au Québec?
«Je ne crois pas, il va toujours y avoir des enfants qui vont être en besoin d’une famille. […] Le profil des enfants a énormément changé, ce ne sont plus des bébés comme dans les années 90. Ils ont une expérience de vie, ils sont plus grands et je pense qu’il y aura toujours des gens prêts à adopter ces enfants-là», espère la directrice générale du SAI.
Sans surprise, la pandémie de COVID-19 a aussi brusquement freiné l’adoption internationale, comme l’avait rapporté Noovo Info l’an dernier.
À voir également - L'impact de la pandémie sur l'adoption internationale
Malgré la tombée successive et généralisée des restrictions liées au voyage, il est encore trop tôt pour déclarer que la situation se stabilisera ou même s’améliorera en 2022.
«Pour la pandémie, c’est vraiment à géométrie variable ce qu’on voit en ce moment, explique Geneviève Poirier. Dans certains pays, on voit une reprise, mais plusieurs États sont toujours confrontés aux conséquences du délestage des activités dans les ambassades ou au sein des services de protection de l’enfance dans les pays d’origine.»
Aussi, certains pays, comme la Chine, refusent toujours de rouvrir leurs frontières aux parents adoptants en raison du contexte sanitaire mondial.
«Évidemment, certains parents sont découragés par l’attente que ça peut représenter. [...] Au provincial ou au fédéral, certaines procédures complexifient aussi les démarches et allongent les délais», constate Marielle Tardif.
La Fédération des parents adoptants du Québec réclame d’ailleurs le déploiement de ressources supplémentaires pour accélérer l’étude des dossiers des futurs parents et diminuer les obstacles bureautiques liés à l’immigration. De l’argent qui pourrait aussi servir à établir de nouveaux partenariats avec des pays, qui n’ont toujours pas d’entente avec le Canada.
Ce sentiment de découragement évoqué par Marielle Tardif, Catherine Nadon l’a ressenti à quelques reprises au cours des six dernières années.
Son conjoint et elle ont débuté leurs démarches d’adoption aux Philippines à l’automne 2015. Leur dossier a été approuvé par les autorités locales en juillet 2016. Puis, plus rien… ou presque.
«On compte les mois. Les mois s’allongent. Plus on attend, plus les mois semblent un peu plus longs, mais on se dit qu’on doit s’approcher du but», raconte la résidente de l’Outaouais, qui tente de rester optimiste malgré tout.
Bien que leur dossier soit mis à jour aux deux ans, aucun jumelage n’a encore été officialisé et l’information leur parvient au compte-gouttes.
La pandémie expliquerait en partie ces délais. Sur le terrain, on lui aurait expliqué que les services sociaux ont eu un accès limité aux enfants en raison de la crise sanitaire.
«Ça fait des années qu’on réfléchit et qu’on s’investit émotionnellement dans ce projet. Pour nous, ça nous tient à cœur, il n’est pas question d’abandonner», lance Catherine Nadon, sans hésitation.
«C’est sûr que [le chiffre de 46 adoptions] c’est un peu triste, admet-elle. Les orphelinats ne se sont pas vidés d’enfants, c’est plutôt le contraire. Je crois que le contexte actuel a complexifié les jumelages, ce qui fait en sorte qu’on se retrouve avec des chiffres jamais-vus.»
Si Catherine Nadon témoigne publiquement de son expérience, ce n’est pas pour décourager de futurs parents adoptants, bien au contraire. Elle souhaite plutôt les sensibiliser à cette nouvelle réalité et les inciter à bien se renseigner avant de se lancer dans l’aventure.
«Informez-vous, allez chercher des ressources. C’est une façon d’être bien conscient du projet dans lequel on s’embarque, dit-elle. Quand on décide de s’ouvrir à l’adoption internationale, il faut s’ouvrir à encore plus de surprises et à différents aléas. Il faut donc être très résilient et être prêt à plusieurs choses.»
Pour mieux orienter les Québécois dans leurs démarches, le gouvernement du Québec a aussi mis en place, en mai dernier, un nouveau programme afin de soutenir les gens désirant adopter un ou des enfants à l’international.