En cette fin d’année scolaire, je vois défiler sur les réseaux sociaux des publications et des photos d’enfants médaillés, gratifiés, célébrés. Certificats ou trophées en main, ils remportent les honneurs pour leurs performances, ils sont félicités pour leur excellence. Et les autres ? Les autres, rien.
Bien sûr, il existe des écoles où les catégories incluent des nominations pour la plus grande amélioration durant l’année, la plus belle personnalité, les efforts soutenus.
Mais le grand honneur, celui de fin de gala, il revient aux plus performants, à ceux qui montent sur la plus haute marche du podium pour leurs exploits en mathématiques, en sciences, en langues, en sport.
Le clou de la soirée, c’est la catégorie des meilleures moyennes générales, un idéal difficile à atteindre pour plein d’enfants.
Il y a les enfants qui bûchent et persévèrent sans que cela ne se reflète dans leurs notes.
Il y a les enfants qui vivent avec des diagnostics, des troubles, des problèmes de comportements, comme autant de petits nuages gris qui planent au-dessus de leur tête (et que le système scolaire, en manque de ressources, peine à dissiper).
Il y a les enfants qui filent leur primaire et leur secondaire sous le radar : ils sont dans la moyenne, ils passent sans flafla, ils sont banals, normaux, ordinaires diraient certains. Et pas tellement remarqués.
Il y a ceux qui détestent l’école, se lèvent désorganisés, un pied dans la rêvasserie et l’autre dans le chaos de leurs pensées. Ils ne veulent pas aller en classes — mais ils n’ont pas le choix. Passer à travers les journées, c’est déjà un tour de force.
Hiérarchie et étiquette
Il y a les enfants anxieux, introvertis, timides, complexés, stressés. Ceux qui longent les murs, baissent la tête et ceux qui redoublent d’efforts simplement pour se présenter, pour socialiser, pour apprendre.
Et il y a ceux encore qui sont en perte d’estime, pris dans des foyers dysfonctionnels, compliqués, instables peut-être même mésadaptés, violents. C’est dur de se remplir la tête d’apprentissages quand on a le cœur vide d’amour.
Il n’y a pas de Club des petits déjeuners pour les enfants en manque d’attention, de câlins et de mots doux.
Pour tous ces enfants, la ligne d’arrivée est loin et elle est difficile à atteindre. Ils n’auront pas de prix, aucun Méritas, ils ne seront pas applaudis.
C’est comme si déjà, à l’école, on hiérarchise et on étiquette les futurs citoyens : les bons et les moins bons. Les méritants et les indignes.
Un petit boost
Mais l’exploit prodigieux, le vrai, n’est-il pas d’avoir fait de son mieux, d’avoir donné tout ce qu’on a pu, dans le contexte qu’on avait, d’avoir été au bout de son potentiel ? L’excellence fait les manchettes — mais c’est un peu plate…
En cette fin d’année scolaire, j’ai une pensée pour les élèves qui sont en fin de peloton et ceux qui sont au milieu, invisibles.
J’espère que les parents et le personnel scolaire sauront booster leur moral, les faire sourire, leur faire voir leurs forces, leurs qualités, leurs compétences, les accompagner et leur donner une tape dans le dos.
Il n’y a rien de plus triste qu’un enfant qui ne croit plus en lui, vulnérable, laissé derrière.
C’est aussi leur fin d’année. Même s’ils ne brillent pas à l’avant, même s’ils ne montent sur aucune scène, ils avancent. Un pas à la fois. Une journée à la fois.
Et ça aussi, c’est grand.
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