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Selon Pékin, le Canada aurait contaminé la Chine avec Omicron, rien de moins. On se croirait dans un film, la contamination ayant apparemment eu lieu suite à l’envoi d’une lettre par la poste. Du moins, si on donne foi à ce récit quelque peu surprenant.
À quelques jours du début des Jeux olympiques de Pékin, on comprend que la Chine puisse craindre comme la peste (sans jeu de mots) l’arrivée du nouveau variant qui, selon les dires de ses dirigeants, serait toujours absent de son territoire. D’autant plus que le contrôle de la circulation virale y est excellent, le pays rapportant moins de 200 cas par jour depuis plusieurs semaines. D'ailleurs, cela représente, si les chiffres sont exacts, une situation 5000 fois meilleure que la nôtre, toutes proportions gardées.
La lettre incriminée aurait été mise à la poste chez nous le 7 janvier 2022 et reçue là-bas le 11 janvier. Après analyse en laboratoire, elle contiendrait une quantité respectable de particules de virus viables, identifiés dans 12 échantillons sur 22.
Elle aurait ainsi contaminé une citoyenne chinoise, pour laquelle aucune autre voie possible de contamination n’aurait apparemment été identifiée. Pas moins de 69 « contacts proches » et, tenez-vous bien, 16 457 personnes à risque auraient été testées. Pourtant, aucune ne s’est avérée positive. Bref, il n’y aurait qu’un seul cas d’Omicron en Chine… et il serait « made in Canada », comme on dit.
On peut toutefois se demander si une telle contamination est possible. Essayons d’y voir clair, en acceptant les faits tels que présentés, même s’ils sont contestés par les autorités canadiennes.
Une contamination par contact avec une surface où repose le virus peut survenir, même si d’après le CDC, « sur la base des données épidémiologiques disponibles et des études sur les facteurs de transmission environnementaux, la transmission de surface n’est pas la principale voie de propagation du SRAS-CoV-2 et le risque est considéré comme faible. »
Mais il est vrai que le virus peut survivre hors des cellules d’un organisme vivant.
Toutefois, aussi longtemps ? Trois jours comme il est question ici ? La réponse est probablement oui.
C’est qu’on a déjà identifié des virus viables plusieurs jours après leur dépôt sur une surface lisse, comme du métal ou un lavabo, bien que 99 % des virus sont détruits après 3 jours sur ces surfaces.
C’est que la surface du virus, formée de protéines et de lipides, est fragile et se dégrade facilement, rendant inopérant le virus.
Cependant, dans des matériaux poreux comme du papier, la survie n’est généralement que de quelques minutes à quelques heures. Bon, quand on parle de « survie », pour un virus, on parle simplement du maintien de son intégrité, suffisamment pour lui permettre de se reproduire lorsqu’il infecte à nouveau une cellule.
Aussi, une autre condition pour transmettre la maladie est qu’assez de virus soient disponibles pour réussir infecter la cible. En effet, il ne suffit pas d’une seule particule virale pour aboutir à une infection. Il en faut généralement beaucoup plus, de manière à dépasser les défenses immunitaires et infecter les cellules.
Pour le virus de la COVID-19, on ne sait pas exactement quel nombre de particules est requis, bien qu’en général et sur la base de modèles recrées avec le SRAS de 2003, on pense que quelques centaines de virus sont suffisantes, ce qui est tout de même peu, quand on sait qu’un adulte moyen infecté en transporte entre 1 et 100 milliards.
Fait intéressant, des chercheurs ont estimé à seulement 0,1 mg le poids de tous ces virus dans un seul malade, ce qui fait qu’on peut calculer à 5,6 kg la masse de tous les virus présents en ce moment parmi les 56 000 000 millions d’humains affectés en ce moment par la maladie ! Tout ça pour quelques kilos de virus…
Même si la transmission par des surfaces est possible et que certains cas ont été documentés, il s’agit d’un phénomène rare, à telle enseigne qu’on se demande bien pourquoi on continue à nettoyer les surfaces avec autant d’énergie, alors qu’il s’agit au mieux d’un mécanisme tout à fait mineur.
Mais il faut généralement que la personne éternue ou tousse directement sur la surface (on espère que ce n’est pas le cas pour la lettre transmise en Chine) puis que les muqueuses de la personne cible entrent ensuite en contact avec ces liquides biologiques.
Bref, s’agissant d’une histoire aussi abracadabrante, je dirais au mieux qu’elle n’est pas totalement impossible, mais qu’elle demeure à peu près aussi improbable que, je ne sais pas, une fuite de laboratoire ayant laissé s’échapper un virus, tiens.